La Chambre noire : Laboratoire photo
Scène

La Chambre noire : Laboratoire photo

Dans les années 70, l’artiste tchèque Jan Saudek s’emmure dans une cave glauque pour photographier des femmes nues dans des poses inquiétantes, malgré le harcèlement des autorités communistes. Il répète alors à qui veut l’entendre que dans l’art photographique, comme en amour, tout est permis. Créées dans l’ombre, ses oeuvres provocantes sont mises en lumière au Théâtre Prospero par Patrice Tremblay, qui a composé un envoûtant poème scénique à partir de ses clichés favoris. Le jeune metteur en scène nous entraîne donc à sa suite dans La Chambre noire, où défilent de troublantes jeunes filles modèles…

Dans les années 70, l’artiste tchèque Jan Saudek s’emmure dans une cave glauque pour photographier des femmes nues dans des poses inquiétantes, malgré le harcèlement des autorités communistes. Il répète alors à qui veut l’entendre que dans l’art photographique, comme en amour, tout est permis. Créées dans l’ombre, ses oeuvres provocantes sont mises en lumière au Théâtre Prospero par Patrice Tremblay, qui a composé un envoûtant poème scénique à partir de ses clichés favoris. Le jeune metteur en scène nous entraîne donc à sa suite dans La Chambre noire, où défilent de troublantes jeunes filles modèles…

Ainsi, c’est dans une vieille cave sombre et froide que Jan Saudek demande à des amies, maîtresses et filles de la rue de poser dévêtues, juchées sur un tabouret ou couchées par terre devant une fenêtre. Ses clichés sont à la fois obscènes et poétiques, menaçants et obsédants. Les fans du musicien Daniel Lanois se rappelleront que ce dernier avait d’ailleurs choisi une photo de Saudek – une jeune femme nue aux côtes saillantes, brandissant un couteau – pour illustrer son album For the Beauty of Wynona... Bien que le travail du photographe ait été reconnu à l’échelle internationale au milieu des années 70, ce n’est qu’une dizaine d’années plus tard qu’il obtint enfin le permis lui accordant le droit d’exercer librement son métier.

Dans le cadre de son mémoire de maîtrise, Patrice Tremblay a voulu partager avec le public montréalais sa fascination pour le photographe tchèque. La Chambre noire se compose de 28 tableaux oniriques, sans paroles, mettant en scène six femmes et un homme errant dans un espace dépouillé (un décor de Mathieu Poirier-Galarneau). Vêtues de robes diaphanes, parfois nues, les comédiennes nous donnent à voir l’avant et l’après de chaque cliché, l’air souvent torturé, blessé, gêné. En quête de gestes tendres, ces grâces vont, viennent, fredonnent un air traditionnel ou dansent, tandis que le maître des lieux les épie.

Tout est épuré dans ce spectacle, de la gestuelle des comédiens-danseurs (Michelle Beaudoin, Isabelle Cloutier, Nathalie Grenier, Lyne Lefort, Marie-Claude Marleau, Mathieu Marleau et Christine Pinard) à la musique omniprésente de Lynn Katrine Richard et Sylvain Arsenault, aux éclairages sculptants de Claire Lamarre. Étrange et captivante, leur Chambre noire mérite que l’on s’y attarde une courte heure. L’originalité de cet album de photos aux multiples dimensions laisse présager un bel avenir pour la jeune compagnie Camera Obscura, qui projette de poser sous peu sa lentille sur les écrits de Federico Garcia Lorca.

Jusqu’au 17 mai
Au Théâtre Prospero