Lost – Entrevue avec Marie Dumais : Fuite en avant
Scène

Lost – Entrevue avec Marie Dumais : Fuite en avant

À une époque où il est cliché – mais vrai – de dire que tout s’accélère, "je me rends compte que je n’ai pas le même rythme que les autres, confie MARIE DUMAIS. Je prends le temps: de faire le vide, et d’essayer de bien recevoir les choses". Notre rapport au temps: voilà ce qu’interroge sa dernière pièce,  Lost.

Quatrième création de Marie Dumais en autant d’années, Lost est le fruit de plusieurs mois de travail. Laissant mûrir les choses, cette artiste "curieuse, étonnée de tout", nous a habitués à des créations diverses, très personnelles; son exploration des langages scéniques, dont le mouvement et les éclairages, crée images et univers particuliers. Si elle a adapté des oeuvres littéraires pour La Peste, Histoires minimales et Moi, Orlando, Marie Dumais, pour Lost, signe les textes, en plus d’assumer mise en scène et interprétation. Elle a élaboré ce spectacle avec la collaboration des concepteurs Lionel Arnould, Jacques Collin, Stéphane Fortier, Louis-Marie Lavoie, Martin Beausoleil, et la complicité, sur vidéo ou en voix hors champ, de Daniel Bélanger, Martin Genest, Kevin McCoy, Réjean Vallée.

"L’idée de départ, explique-t-elle, c’est mon sentiment face à notre époque. C’est une création sur la vitesse du temps, dont on se sent souvent victime. Mais c’est nous qui avons donné au temps cette vitesse-là, en essayant de faire toutes sortes de machines, des ordinateurs, des réseaux de communication de plus en plus performants pour nous aider. Ces systèmes-là vont vite, mais nous obligent à rentrer dans cette vitesse, à y prendre place. Ils nous ont dépassés, et il faut les rattraper; et les gens sont constamment essoufflés. Ce que ça a engendré au travail se reflète aussi dans la vie personnelle, la vie sentimentale, les rencontres avec les gens. Partout, ça court, ça va vite. Et pourtant, l’humain, depuis quelques milliers d’années, essaye de s’installer dans quelque chose – une vie de couple, élever des enfants, faire des traditions. Là, on se sent tiraillé entre les deux; on ne sait plus comment faire pour durer."

Sans raconter une histoire de façon linéaire, Lost présente des impressions et fait appel aux sens, à travers texte, mouvement, effets visuels et sonores. "Je parle de cette espèce de tourbillon dans 32 courts tableaux, entre lesquels il y a un lien: c’est toujours moi, qui essaye de m’insérer dans le temps. Moi en tant que femme, en tant qu’artiste, en rapport avec la pensée et avec les sens, qui reçoivent constamment de l’information, trop d’information. Ce n’est pas réaliste; ce sont des impressions, non des analyses. C’est une conversation avec le public. J’appelle ça une cérémonie; c’est très zen."

Ce spectacle, conçu avec très peu de moyens, Marie Dumais le pose comme le premier jalon, espère-t-elle, d’une réflexion à développer, pour explorer plus avant les pistes proposées ici. "Il y a là une source, une idée qu’il faut faire suivre, et enrichir."

Jusqu’au 31 mai

Au Théâtre de la Bordée
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