Scène

Hair : Le vent dans les cheveux

Elle a fait un tabac dans les années 60 et, encore aujourd’hui, elle est brûlante d’actualité. La comédie musicale Hair reflète de façon troublante les luttes perpétuelles menées contre l’injustice et la bêtise humaine. Cheveux longs, sexe, drogues & rock’n’roll!

L’intérêt du directeur artistique de la Compagnie Vox Théâtre, Pier Rodier, a été piqué lorsque le directeur artistique du Théâtre de l’Île, Gilles Provost, lui a proposé de revisiter la populaire comédie musicale Hair dans une production communautaire.

L’histoire, créée par les Américains Gerome Ragni et James Rado en pleine période de protestation de la guerre du Viêt-nam, dépeint l’histoire d’un groupe de jeunes hippies, la "Tribu", vivant en marge de la société conventionnelle et revendiquant la guerre en brûlant sa carte d’enrôlement et en proclamant haut et fort leur cri de ralliement: "Faites l’amour, pas la guerre!"

"Le spectacle m’avait beaucoup marqué dans mon adolescence, par tout le côté revendicatif. Hair, c’est en quelque sorte l’univers fantasmagorique d’une époque enterrée, oubliée. C’est ce qui me permet de prendre ça à la légère, de ne pas tomber dans les clichés. (…) Au fond, la pièce c’est le débat du "je" et du "nous", de l’individualité par rapport à la famille, à la communauté", atteste le metteur en scène Pier Rodier.

La comédie musicale a marqué des générations entières avec un propos cru qui traite de mort, de guerre, de sexualité débauchée et qui inclut des scènes de nudité. "J’ai plutôt opté pour la sensualité. Je ne crois pas que ce soit nécessaire d’utiliser la nudité, je pense que ça ne choque plus en 2003. C’est plus cochon de voir un caleçon trempe que de ne pas voir de caleçon… En ce moment, nous sommes à quelques jours de la première, je vais peut-être changer d’idée, on verra", précise le scénographe de la pièce, Pier Rodier.

Pour le projet, le metteur en scène s’est entouré de 14 comédiens-interprètes qu’il a choisis parmi quelques 75 candidats lors des auditions. Un des comédiens de la Tribu, Marcel Joseph, qui incarne le personnage de Hud, a été enchanté par l’ouverture d’esprit de Pier: "J’ai ajouté quelque chose de moderne au personnage en m’inspirant du mouvement hip hop. Puisque mon personnage mène des combats importants, comme ceux contre le racisme et l’exclusion, je trouvais que la mentalité hip hop s’inscrivait bien dans cette démarche, puisqu’il est porteur de messages similaires."

Et que doit-on retenir du spectacle?

"Je crois que ce que le public va retenir de la pièce, c’est que l’être humain est con, que dans le fond malgré toutes les civilisations qui vécurent sur la planète, on continue de faire la guerre, on continue d’être imbécile dans nos relations humaines, on ne fait pas l’amour assez souvent", avance le metteur en scène, précisant qu’il s’agit de "faire l’amour" dans tous les sens du terme.

Ombre au tableau
L’équipe a dû faire face à une rude épreuve, à un mois du spectacle en perdant un confrère, le comédien Daniel Guertin, qui a trouvé la mort lorsqu’un homme en état d’ébriété a heurté son véhicule.

"Ça été très difficile pour l’équipe. Surtout que le show parle de la fragilité de l’être. Nous avons tous réalisé à quel point il faut vivre à fond tout en respectant les autres. Dans une production comme celle-là, on s’abandonne à quelque chose d’irréel, alors ça nous a "groundé". C’est devenu céleste, on avait la tête dans les nuages, et on est venu prendre racine", indique Pier Rodier.

Le spectacle a donc été repoussé d’une semaine et l’équipe a décidé de le dédier à l’homme qui incarnait le rôle de Dad. "Il y a des morceaux de ses costumes sur la scène, dispersés dans le décor. Il est là, avec nous-autres… Et à chaque fois qu’il y a un petit problème technique, je me tourne vers lui et je reprends confiance", conclut le metteur en scène.

Jusqu’au 14 juin
Au Théâtre de l’Île
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