Festival Fringe : Dernier sprint
Le Festival Fringe tire à sa fin. Il ne reste plus qu’une fin de semaine pour s’aventurer dans cette grande foire du théâtre de création, dont la majorité des morceaux intéressants sont présentés, avouons-le, in English. Tradition chère au coeur du public anglo-montréalais (qui y a entre autres découvert Steve Galluccio, l’auteur de Mambo Italiano), cette fiesta théâtrale se révèle cette année plutôt morne du côté franco, où des spectacles de qualité très inégale sont joués devant des auditoires clairsemés, regroupés au Théâtre d’Aujourd’hui.
Dans la grande salle, huit créations s’offrent au public. L’une des plus intéressantes est certainement La Leçon d’Eugène Ionesco, par le Théâtre Groupe Building et le Théâtre de l’Éléphant Plat, venu de France. Cet absurde affrontement entre un maître colérique et sa séduisante (et vigoureuse!) nouvelle élève est mis en scène par le rigoureux Jean-François Huchard et interprété avec beaucoup de drôlerie par Julie Lallier, Jacques Drolet et Catherine Breton (dans le rôle de la bonne peu coopérative). Une charmante découverte.
Au même endroit, les curieux attirés par le titre saugrenu Comment faire fuir les requins et les kangourous pourraient être tentés de prendre leurs jambes à leur cou devant cette succession de numéros qui tombent à plat, où se croisent entre autres un futur marié déguisé en princesse Léa, un sportif suicidaire et un clochard philosophe. Une création imaginative mais peu aboutie et rarement drôle, concoctée par Les Laboratoires Blouin et Les Législateurs de rêves.
Plus accrocheur se révèle La Dernière mise, un drame de science-fiction écrit et mis en scène par Sébastien-Dominic Bernier, dans lequel une vieille dame est "achevée" par un couple qui accepte de l’héberger contre une prime de l’État… versée à la mort de la mémé. Les scènes où le ministre de la Santé (un robot) discute avec son attachée de projets sont particulièrement rigolotes. Une réflexion sur la déshumanisation peu subtile mais efficace.
À voir aussi: la sonore Carmen, interprétée par quatre chanteurs, un comédien et un duo piano et accordéon; le No Man’s Land Show de Dave St-Pierre, où des comédiens-danseurs dévêtus témoignent de la solitude urbaine; Les Parapluies dans le désert, de Requiem Théâtre; Plutôt divertissant, une chorégraphie farcie d’humour de Frédérick Gravel; et Une étoile se meurt, "drame-comédique" d’Alexandre Lefebvre et de la troupe 100 Prétentions mettant en scène un comptable qui pète les plombs et se lance à la recherche d’une étoile avec des itinérants.
Enfin, dans la petite salle Jean-Claude Germain, neuf expériences peuvent être tentées d’ici dimanche: Inconnu à cette adresse, Antiviol, Je suis un pays, Contes de gouttières, Le Chien belge et l’hommo-québécus-érectus, L’ensemble de la morsure comprend 32 trous, Les Circus Cowboys, Richard III ou la chute du corbeau et Drame familial, un huis clos sanglant où deux frères qui ne sont jamais sortis de la demeure familiale ont enfin l’occasion de s’évader de leur geôle. Sombre et maladroit… à l’image du volet francophone du Fringe 2003, en somme! On ne peut qu’espérer que la précieuse collaboration du Théâtre d’Aujourd’hui, qui ouvre grand ses portes à l’événement, encourage un nombre croissant de créateurs inspirés à utiliser ce banc d’essai…
Jusqu’au 22 juin
Au Théâtre d’Aujourd’hui
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