Sophie Faucher : La vie devant soi
En tournée internationale depuis deux ans avec sa création Apasionada,SOPHIE FAUCHER nous revient dans Appelez-moi… Maman! (comment survivre à la maternité), un hommage acidulé aux "joies" d’être mère.
C’est ce qui s’appelle avoir le feu sacré. Il y a quelques jours, une alarme d’incendie interrompt les répétitions d’Appelez-moi… Maman! (comment survivre à la maternité). La bouillante metteure en scène Denise Filiatrault crie: "On n’a pas le temps, cr…!", avant de sortir avec les six comédiennes, contre son gré. "On se retrouve assises dans un parc peu invitant, face au Monument-National. Et là, tandis que les camions de pompiers arrivent à grand fracas sur le boulevard Saint-Laurent, Filiatrault décide de replacer une scène! Cette vision de la metteure en scène hurlant ses indications par-dessus les sirènes, je vais l’avoir en mémoire longtemps!" s’esclaffe la tout aussi passionnée Sophie Faucher, qui en est à sa deuxième collaboration avec la reine du timing.
Depuis 13 ans, Denise Filiatrault déride les amateurs de théâtre durant le Festival Juste pour rire. Après un Irma la douce un peu trop sucré au goût de certains, la voici de retour avec une comédie jouissive à l’allure de thérapie collective, qualifiée de formidable exutoire lors de son passage au Centaur l’hiver dernier. Jouée pour la première fois dans la langue de Michel Tremblay (qui en signe la traduction), Mom’s the Word est l’oeuvre de six auteures de Vancouver qui, se réunissant chaque samedi matin dans le but d’élaborer un spectacle, ont finalement décidé de monologuer sur ce qu’elles tentaient de fuir, sans succès: leur quotidien de maman. Avec un humour irrésistible, elles nous entretiennent donc à tour de rôle des aspects les moins drôles de leur nouvelle existence.
Le résultat est une sorte de croisement entre l’hilarant bouquin Je ne sais pas comment elle fait, de la journaliste anglaise Allison Pearson, et Les Monologues du vagin, d’Eve Ensler. "Sauf que cette fois, on ne parle pas du vagin mais de ce qui en sort…", pouffe Sophie Faucher. La comédienne ajoute que Denise Filiatrault a coloré l’oeuvre à sa manière, en demandant à certaines interprètes de prendre un accent "ethnique", dont Néfertari Bélizaire et Isabelle Pastena. Sophie Faucher campe une Française au bord de la crise de nerfs et Sylvie Dubé, Caroline Dardenne et Valérie Blais complètent la distribution. "Mon personnage, Jill, panique. Les spectateurs s’imagineront peut-être que je suis ainsi, mais c’est très, très loin de moi!" La maman d’une petite Clémentine, sept ans, ajoute: "Filiatrault veut montrer que les problèmes des mères sont les mêmes, peu importent la race ou le continent."
Tout petit la planète
Au cours des dernières semaines, Sophie Faucher s’est glissée sous la robe de Frida Kahlo à San Francisco, Berkeley et Los Angeles, dans la production d’Ex Machina. C’est avec joie qu’elle pose ses valises à Montréal. "J’ai accepté ce rôle qui se rapproche du stand-up comic parce que je trouve le texte charmant, mais aussi pour travailler avec madame Filiatrault." L’actrice au tempérament fougueux ne craint pas cette metteure en scène franche, voire brutale. "Elle n’aime pas les paresseux et veut obtenir un résultat immédiat, ce qui est parfois difficile. C’est une travailleuse acharnée, exigeante et volontaire, qui agit un peu comme une mère de famille qui veut le meilleur de ses enfants."
Les méthodes de travail de la populaire réalisatrice de C’t’à ton tour, Laura Cadieux ne déplaisent pas à Sophie Faucher, qui reconnaît tout de même avoir pris goût à la liberté avec son projet sur Frida Kahlo, mis en scène par Robert Lepage. "J’ai eu mon mot à dire sur tout. Ce que j’aime avec Lepage, c’est que le spectacle évolue, que la forme n’est jamais définitive. Tandis que dans Appelez-moi… Maman!, je ne peux pas décider d’ajouter un numéro, même s’il serait très drôle de raconter mon accouchement, dans un hôpital anglophone, le jour du référendum!" Convaincue qu’Apasionada s’est beaucoup raffiné depuis sa création, Sophie Faucher rêve de présenter de nouveau son spectacle à Montréal…
En attendant, elle se prépare avec plaisir à raconter sur le ton de la confidence les hauts et les bas de la vie de maman, un rôle qu’elle connaît bien. Elle sort de son sac une lettre d’amour que lui a remise, la veille, sa fillette. Cette missive ornée de coeurs trônera dans sa loge. "Elle m’a dit: "C’est bien, maman, parce qu’après avoir beaucoup fait pleurer les gens avec Frida, tu vas les faire rire." Elle a raison. Cette pièce démystifie la maternité, écorche légèrement les hommes au passage mais n’a rien d’un plaidoyer féministe virulent. C’est un spectacle qui fait du bien."
Du 18 juin au 26 juillet
Au Théâtre Saint-Denis II
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