Compromis : Thèse de vie
"C’est rendu que je commence à m’en faire en me demandant ce qui va arriver une fois que j’aurai terminé mon travail. C’est mauditement compliqué, je veux le terminer, mais je ne veux pas le compléter, c’est un paradoxe étrange!" – Aaron Keyes
C’est les yeux remplis de larmes que le directeur artistique du Théâtre de l’Île, Gilles Provost, m’a accueilli sur la magnifique terrasse de son lieu de prédilection. C’est que le dévoué comédien pratiquait le rôle qu’il interprètera dans sa prochaine production Compromis. "Je viens de faire deux crises de larmes, parce que mon personnage vit cela à un moment dans la pièce et je ne voulais pas que ce soit fabriqué ou technique. Ce n’est pas que je sois exhibitionniste, mais je dois vraiment amasser toutes les inquiétudes de la vie du personnage et pleurer…", explique le directeur artistique. Compromis est en quelque sorte un cadeau de l’auteur américain reconnu Israël Horovitz – qui avait connu Gilles précédemment pour d’autres productions (L’Examen de passage, 1997, Quand Marie est partie, 2000) – puisqu’il lui a proposé sa dernière pièce en lui indiquant qu’il avait un rôle parfait pour lui.
La pièce, traduite par Annick Léger, trace le portrait d’un neurologue new-yorkais, Aaron Keyes, qui, ayant consacré sa vie à la recherche pour le bien de l’humanité, se questionne sur ses valeurs face à son métier et par rapport aux gens qu’il aime, comme sa fille (Magali Lemèle) qu’il connaît à peine.
"Gilles a vite senti que le rôle l’interpellait personnellement. Ça le rejoint dans toutes ses fibres, lui qui a consacré tant d’années à son théâtre, il essaie de faire le point, tout comme le personnage", atteste la metteur en scène, Claire Faubert, complice de longue date du Théâtre de l’Île.
La pièce met en scène deux autres personnages, de race noire, Alice (Mireille Métellus), sa femme de ménage depuis 25 ans avec qui une histoire d’amour s’est développée, et son fils, l’adjoint du médecin (Marcel Joseph).
"La pièce ne traite pas de racisme pour en faire des victimes, il n’y a pas de victimes. Ça aurait pu être une blanche, mais c’est une femme noire. Ce que j’apprécie de mon personnage c’est qu’elle ne tombe pas dans les clichés de la "Aunt Jamima", je me la décris plutôt comme la femme forte de l’Évangile", remarque la polyvalente comédienne, Mireille Métellus, qui a récemment participé à deux épisodes de la télésérie américaine E.R..
L’auteur se déplacera de New York pour venir assister à une représentation de l’adaptation Compromis, comme il l’avait fait pour les précédentes.
"Il a toujours aimé nos productions parce qu’il dit qu’on respecte les personnages et que l’on donne une autre dimension à la pièce. Pour celle-ci, il m’a dit qu’il avait foi en moi", affirme Gilles Provost.
"Il fallait l’immense talent d’Horovitz pour écrire une histoire aussi actuelle, qu’émouvante. C’est un texte tendre avec beaucoup d’humour qui pose des questions extrêmement importantes sur la retraite, sur que faire lorsque les projets nous abandonnent, sur l’ambition, le goût de la consommation, etc.", conclut Claire Faubert.
Du 17 septembre au 25 octobre
Au Théâtre de l’Île
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