Hooman Sharifi : Corps étranger
Scène

Hooman Sharifi : Corps étranger

Le chorégraphe d’origine iranienne HOOMAN SHARIFI rend visite au public montréalais sous la bannière de son Impure Company, établie en Norvège.

Il est fréquent de voir des créateurs migrer vers une terre "d’exil ou d’accueil". En danse -comme on a pu le constater durant le FIND-, c’est notamment le cas de Meg Stuart, William Forsythe, Manon Oligny, Livia Daza-Paris et Hooman Sharifi. Est-ce pour faire honneur à la maxime qui dit que nul n’est prophète en son pays? Ou serait-ce, plus banalement, parce que les bailleurs de fonds et les lieux de diffusion ont plus d’aisance à reconnaître la valeur d’une oeuvre qui se distingue par son exotisme? C’est une hypothèse envisageable quand on sait que, d’une part, on a bien de la difficulté à reconnaître notre propre valeur, et, d’autre part, que certains systèmes -dont la visée est davantage la promotion que la réflexion- ont tout intérêt à ce qu’il n’y ait de renouvellement autre que celui qu’ils ont décidé de mettre en place et de maintenir…

Le chorégraphe irano-norvégien semble avoir eu cette prise de conscience à un âge précoce. En effet, c’est à 14 ans qu’il prit le nord (comme on dit!), seul, laissant derrière la chaleur de son pays d’origine. On aurait tendance à croire que, dans son cas, il s’agissait d’un geste volontairement politique. Car Hooman Sharifi est de ceux qui définissent l’art comme un acte impliquant nécessairement un engagement profond et l’éveil d’une conscience sociale. Il affirme d’ailleurs, à l’intérieur d’un document expliquant les objectifs artistiques de sa compagnie, qu’il a choisi l’art du mouvement comme moyen d’expression parce que, pour lui, il n’y a pas de différence entre ce qu’il est et ce qu’il fait. Ses spectacles ont donc pour objectif de générer une certaine réflexion chez le public: "L’idée, c’est que les gens sortent du spectacle en ayant fait l’expérience d’un aspect d’eux-mêmes et de la société dans laquelle ils vivent."

As If Your Death Was Your Longest Sneeze Ever, que le chorégraphe nous présente en première nord-américaine, reflète concrètement ce discours. Il s’agit d’une réinvention des notions de la représentation traditionnelle, s’incarnant formellement à travers le toucher, le son et l’éclairage, ainsi que conceptuellement par le dialogue, le play-back et l’immédiateté. Trois performeurs interagissent entre eux et avec les spectateurs/acteurs, mettant alors en scène une pièce dont le propos a la résonance d’un appel à la tendresse et à la communication.

Parallèlement à ce spectacle, Hooman Sharifi nous fera l’honneur de venir s’entretenir avec nous de la nouvelle géopolitique de la danse. Ceci, en compagnie de la Vénézuélienne Livia Daza-Paris. L’événement aura lieu le samedi 11 octobre (12 h), au Montréal, Arts Interculturels (MAI). Ces deux témoins vivants d’une déterritorialisation progressive de la danse et des mouvances géographiques de plus en plus marquées soulèveront alors des questionnements tels: comment la danse se transforme sous l’effet des phénomènes migratoires et comment le lieu d’origine influence le travail, dans sa conceptualisation, dans sa réalisation et dans ses modes de production et de diffusion.

Les 10 et 11 octobre
Au Studio de l’Agora de la danse