Quatuor : L’été en automne
Un peu d’été dans votre automne? Lénie Scoffié, Raymond Cloutier, Gilles Pelletier et Patricia Nolin, manifestement, sont les meilleurs éléments de cette pièce aux allures de théâtre d’été, qui ne fait qu’effleurer les thèmes, maintes fois visités, que sont la vieillesse et la transformation, le temps qui passe et l’amitié comme soudure et prétexte à célébrer la vie. Ils sont très bons, les comédiens. Impeccable aussi, la traduction de Pierre-Yves Lemieux. Ensemble, ils arrivent à rendre attachants et sympathiques les personnages bien campés, malgré tout, de Quatuor, pièce à mince teneur dramatique, écrite par Ronald Harwood. Le dramaturge britannique, fort d’un Oscar comme meilleur scénariste pour L’Habilleur (il a aussi scénarisé l’excellent The Pianist de Polanski), n’arrive pas, avec Quatuor, à dépasser la blague légère et les pirouettes faciles ("parlant d’étalon, où sont mes chaussettes?").
L’histoire met en situation quatre grands artistes d’opéra, dont une véritable diva, qui cohabitent dans une maison de retraite avec d’autres musiciens. Pour l’anniversaire de Verdi, ils préparent un numéro autour d’un morceau qui les a rendus célèbres. Le Quatuor, bien entendu. On a bien droit à quelques réflexions savoureuses sur l’art, mais on nage à la surface. Dommage, car la mise en scène de Philippe Soldevila (Des fraises en janvier) montre bien l’excellent travail des comédiens qui arrivent à séduire une partie du public désireux de se détendre ou de s’amuser. Un peu plus de rigueur du côté du texte et on se rallierait tous, aisément, à l’idée.
Plusieurs choses agacent. On sent cette mécanique, cette recette, qu’applique l’auteur pour faire que les personnages, tour à tour, se dévoilent selon le principe des poupées russes. Ils ont tous leur moment, un zoom peu subtil, où ils se confessent ou se rapprochent de manière prévisible. Pour un peu, on entendrait monter une musique dramatique comme dans les mauvais films. D’ailleurs, c’est peut-être le projet de l’auteur: en faire un scénario. À l’exception du personnage de Jean Horton, interprété parfaitement par Patricia Nolin, rarement pouvons-nous sentir, faute de texte, que ces individus ont connu, sinon la gloire, du moins les palpitations comme les angoisses reliées à cette profession. Aussi, le décor austère est un véritable cliché de ce qu’est censé représenter l’environnement de vieillards initiés à l’opéra. Pourtant, on dit bien dans le texte que c’est le coloré personnage de Cecily Robson (incarné par Lénie Scoffié; un vent de fraîcheur apprécié) qui s’est chargé de la décoration. D’accord, elle est censée manquer de goût et c’est effectivement affreusement aménagé, mais où sont les couleurs vivantes qu’elle porte toujours sur elle et en elle? Quelque chose échappe, comme cette finale pompière supposée nous rallier par le côté enlevant de la superbe musique de Verdi. Celle-ci aurait dû être plus présente d’ailleurs, le tout serait plus rythmé et rendrait justice au travail des comédiens.
Jusqu’au 25 octobre
Au Théâtre du Rideau vert