Anne Le Beau : Bête de scène
Scène

Anne Le Beau : Bête de scène

Il ne vous reste qu’une fin de semaine pour voir le spectacle Le Beau fait la bête, d’Anne Le Beau, présenté à l’Espace Libre. Pour ma part, j’y suis allé samedi dernier. J’avais rencontré la danseuse une quinzaine de jours plus tôt, dans un petit café en bordure de Mile-End, à Outremont. Une personne d’un caractère entier. Sans détour. Sachant répondre aux questions sans trop de paraphrases, avec ce détachement qu’on commence réellement à sentir chez les gens au tournant de la quarantaine, qui ont amorcé la phase de déconstruction de leur ego.

C’est ce même détachement qu’on a pu voir apparaître sur scène, lors des trois pièces (Osselets, Parle-lui et De chair) que l’interprète d’expérience a traversées avec, en alternance, Mathilde Monnard et Marc Boivin à ses côtés, avant d’entreprendre un solo d’une envergure désarmante. Ce dernier tableau, chorégraphié par Brigitte Haentjens, nous place en face d’un être en crise qui s’exorcise, avec un dégoût profondément ironique, de tout l’apparat superficiel dont son univers est fait. Sous les couches de résistance qui tombent, on peut alors voir surgir la beauté baroque d’une monstruosité cachée osant exprimer les pulsions qui l’animent. Cette pièce est une critique intelligente et pertinente des nombreux leurres et standards de la représentation derrière lesquels on permet, par convention, aux artistes de la scène de se dissimuler… mais qui, avec le temps, semblent devenir davantage un boulet qu’un bouclier.

Si Parle-lui, chorégraphiée par Dominique Porte, nous présente, à l’intérieur d’un travail formel intéressant et développé, une facette humoristique d’Anne Le Beau, Osselets (créée par Alain Francoeur) et le solo De chair font davantage sortir "la bête" de son repaire.

Avec De chair, Francoeur parvient à créer un univers clinique où l’on assiste à la dissection d’une relation entre deux femmes. La force d’une telle pièce tient dans sa lenteur quasi chirurgicale, totalement assumée et bien remplie par la tension que les deux interprètes maintiennent entre elles. Aussi, l’utilisation minimale mais juste des éléments scénographiques (visuels et sonores) y est pour beaucoup dans la qualité du rendu chorégraphique.

Cette soirée est une rencontre touchante avec une facette d’Anne Le Beau que, probablement, très peu de gens connaissent. Une expérience à vivre!

Jusqu’au 13 décembre
À l’Espace Libre
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