Limbes/Limbo : En attendant le mot
C’est un objet spectaculaire non identifié d’une grande virtuosité que nous offrent les deux interprètes polymorphes de ce Limbes/Limbo. Utilisant – presque comme un prétexte – un hommage littéraire que rendit Nancy Huston à l’écrivain Samuel Beckett, Lin Snelling et Nathalie Claude sont les deux valets poussiéreux d’une étrange cérémonie. Audacieuses au point d’investir la scène de l’Usine C dans son plus total dénuement, les deux femmes proposent un univers qui, bien qu’il emprunte au grand dramaturge de l’absurde, possède une totale autonomie. Si le texte est bilingue, fondé sur un jeu incessant et délirant entre le français et l’anglais, le discours de ces deux créatures insaisissables n’appartient pourtant qu’à elles.
Le compositeur Jean-Frédéric Messier est pour beaucoup dans la singularité de cet univers. Usant des mots comme des notes, il a imaginé une architecture sonore des plus intrigantes. Au son de cette atmosphère musicale, les deux femmes cohabitent en ce lieu comme le feraient deux clowns d’un inquiétant chapiteau. Aussi terrestres qu’aériens, les deux personnages saugrenus se présentent à nous comme au centre d’une quête insensée. Proches parentes des figures mythiques imaginées par Beckett, elles semblent à la fois souhaiter et redouter la suite des événements. À partir d’un minimum de moyens, en unissant leurs savoir-faire et un sens inné de la dérision, les deux créatrices sont parvenues à donner une performance aussi stimulante que débridée.
Jusqu’au 24 janvier
À l’Usine C
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