Claude Poissant : Un carré de sable
Scène

Claude Poissant : Un carré de sable

Bien que CLAUDE POISSANT s’investisse régulièrement dans la relecture d’un classique de la dramaturgie mondiale, le directeur artistique du Théâtre PàP ne démontre jamais autant de ferveur que lorsqu’il se mesure à la création d’un texte québécois. C’est au tour de FRANÇOIS GODIN de voir sa pièce Louisiane Nord créée par le dévoué metteur en scène.

Dans la cuisine du Théâtre PàP, quartier général de la compagnie qu’il dirige seul depuis 1998, Claude Poissant tente une pause dans la course folle qui précède la première d’un spectacle, histoire d’évoquer sa rencontre avec un univers dramaturgique aussi singulier que séduisant. La plume hors norme qu’il découvrait en signant la mise en lecture de La Lueur au fond des yeux, en 1995, c’est celle que François Godin, un acteur de formation, peaufine depuis maintenant plus de dix ans.

Dès sa première lecture de Louisiane Nord, Claude Poissant est soufflé par la splendeur de cette langue incomparable. "Ce fut un véritable choc, comme devant une sculpture ou une peinture dont la beauté est aussi impressionnante qu’insondable. Face à une telle abstraction, j’ai décidé de revenir m’asseoir devant l’œuvre jusqu’à ce que je la comprenne, jusqu’à ce que je trouve une porte pour y entrer." L’écriture impressionniste de Godin, suggérant bien plus qu’elle ne prescrit, semble en mesure d’offrir au metteur en scène un véritable défi. "Cette pièce a des ramifications infinies, elle oblige le spectateur, comme le metteur en scène, à construire sa propre logique. La langue de François bouleverse la syntaxe, revoit la ponctuation et retranche certains mots afin d’atteindre plus directement son but. Elle est très lyrique et pourtant extrêmement concrète une fois apprivoisée."

Les grands explorateurs
Pour servir cette partition exceptionnelle, Claude Poissant a fait appel à des acteurs dont il ne cesse de souligner les prédispositions à la création. Aux complices de longue date (Louise Bombardier et Marie-France Lambert) se sont joints de jeunes talents (Émilie Bibeau, Vincent Leclerc et Olivier Morin). Parmi la solide équipe de concepteurs du spectacle, mentionnons Ludovic Bonnier, dont le savoir-faire a été reconnu cette année par le Masque de la meilleure conception sonore.

Les destins entrecroisés des cinq personnages de Louisiane Nord offrent une réflexion profonde sur l’identité, l’enracinement et l’évasion. François Godin y trace un portrait très cruel de l’Amérique, un univers auréolé d’une tristesse dont Claude Poissant n’a pas l’habitude. "Il y a beaucoup de nostalgie chez ces êtres, un état que d’ordinaire je fuis comme la peste. Cette fois, j’ai accepté d’entrer dans la mélancolie, dans ce bon vieux spleen." Toujours aussi authentique, craignant les automatismes et la sécurité, le metteur en scène s’empresse à nouveau d’explorer des territoires qui lui sont inconnus.

Du 20 février au 20 mars
À l’Espace Go
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