L'Asile de la pureté : Beau dommage
Scène

L’Asile de la pureté : Beau dommage

Cesser de manger pour atteindre la pureté. Voilà le choix de Marcassilar, alter ego de l’auteur Claude Gauvreau, alors que le suicide de sa muse laisse entrevoir un monde souillé. Mais si l’idée de monter L’Asile de la pureté au TNM était de nous confronter à notre léthargie, il semble que l’on ait oublié de nous y inclure.

Pourtant, plusieurs moyens sont déployés pour que la réflexion ait lieu. Des spectateurs assis sur scène transforment les acteurs en cobayes tandis que les lumières de la salle restent longtemps allumées, nous empêchant de fuir dans le rêve. Mais voilà, il ne suffit peut-être pas d’imposer ce cadre d’observation objective si ce que l’on nous présente par la suite ne se révèle qu’un objet esthétique, aussi réussi soit-il.

C’est dans un univers sépulcral où sonne le glas que l’on nous convie. Le décor de Danièle Lévesque suggère habilement un laboratoire surréaliste où de lourdes lampes d’aluminium descendent du plafond et où des gerbes de fleurs rouges poussent du sol à intervalle régulier. L’enchantement visuel se poursuit avec l’entrée des acteurs portant des costumes monochromes, allant du blanc éblouissant au noir corbeau. Mais la force plastique de cette mise en scène atteint son paroxysme quand Marcassilar (Marc Béland) et sa muse défunte Édith Luel (la danseuse et chorégraphe Estelle Clareton) se prêtent à un tango, morte et vivant dansant ensemble dans un moment d’onirisme sublime.

Il y a certes d’autres trouvailles dans cette mise en scène de Lorraine Pintal, tel un vieux micro descendant du plafond permettant au corrompu Croufandié (Carl Béchard, jouissif) d’énoncer les didascalies de l’auteur. Notons également l’utilisation du Colonel Sanders et son pouvoir d’évocation ainsi que l’ajout d’une lettre de la mère de l’auteur. Mais on ne peut s’empêcher de sortir un peu déçu, alors que Marc Béland a peut-être éloigné Marcassilar de nous par un jeu excessivement physique nous laissant malheureusement voir davantage l’aliénation que le discours. On applaudit la performance d’un acteur illustrant la névrose alors que c’est peut-être la plus grande contradiction de l’entreprise. À vous de juger de l’inconvenance. Beau mais inoffensif.

Jusqu’au 6 mars
Au Théâtre du Nouveau Monde
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