Oh les beaux jours : Dans les petits pots…
Scène

Oh les beaux jours : Dans les petits pots…

"Le vieux style", dit-elle, sourire fendu jusqu’aux larmes. Ces larmes pas encore sèches que nous avions à peine remarqué naître. La lumière franche comme un soleil trop beau ouvre la pièce sur Winnie ensevelie jusqu’à la taille dans une énigmatique butte. Au sol, son compagnon; un rampant Willie dont on n’aperçoit que l’arrière du crâne, légèrement abîmé. Devant elle, un sac dont elle extirpera Brownie, son revolver. Willie, Winnie, Brownie et le temps qui reste.

Pas de grands gestes ni d’expositions criantes des émotions qui bouillent à travers ce monologue, quasi ininterrompu, de cette remarquable Winnie. Marie-Ève Bertrand (Romances et Karaoké, Un carré de ciel et le rôle principal du film Mariages) a bien saisi toute la charge de cette importante pièce qu’est Oh les beaux jours, comme elle a compris l’essence même de l’écriture de Samuel Beckett. À l’heure où d’excellentes comédiennes (Sylvie Léonard et Céline Bonnier) livrent des monologues avec justesse sur d’autres scènes, Marie-Ève Bertrand peut se vanter de servir cette œuvre intelligemment; elle ne s’accapare pas le texte, elle le porte.

Quant à la mise en scène de Serge Mandeville, la sobriété respectée dans les moindres détails du décor, des éclairages et du jeu dénote une confiance judicieuse envers la comédienne et une humilité certaine devant le texte. Ne cherchez pas ici les extravagances ou les accessoires coûteux. On dirait bien que personne, par cette pièce, n’a quelque chose d’autre à prouver que l’amour pour le théâtre et le travail bien fait.

Jusqu’au 12 mars
Au Théâtre Prospéro
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