Christian Vézina : Le bruit des choses vivantes
Après Jacques Prévert, Michel Garneau et Jacques Ferron, c’est au tour de Gérald Godin de voir son œuvre poétique portée à la scène par CHRISTIAN VÉZINA.
La poésie regagnerait-elle ses galons? Plus que jamais, ce style souvent boudé par le grand public tente de se renouveler. Christian Vézina, qui en fait son cheval de bataille depuis des années, nous offre une nouvelle création théâtrale poétique autour de la poésie de Gérald Godin, Ils ne demandaient qu’à brûler, au Théâtre La Chapelle, en collaboration avec la Fondation Metropolis bleu.
"Je voulais amener la poésie sur scène de façon efficace et j’ai fini par prendre goût à la circonstance scénique et théâtrale", nous explique celui qui a su porter à la scène les mots d’Henri Michaux à l’Espace libre, il y a quelques années. "La poésie est un trésor de l’humanité dramatiquement peu fréquenté."
Peut-être parce qu’une certaine école de pensée veut que la poésie ne soit pas faite pour être dite. "Peut-être aussi parce qu’elle est souvent mal dite! s’exclame Vézina. Ce ton déclamatoire est peut-être ce qui nuit le plus à la rencontre du grand public avec la poésie. C’est la mort de celle-ci! C’est la chose contre laquelle je me bats le plus souvent, mais il y a un respect coincé, une déférence qui empêche souvent d’oser bardasser le poème."
Audace devant laquelle Christian Vézina ne recule pas, tout à sa mission de partager la poésie avec des publics de tout acabit. Après avoir créé des spectacles poétiques autour de Prévert, Garneau et Ferron, Vézina s’intéresse ici à la poésie de Gérald Godin, qui demeure méconnue. "C’est l’œuvre bousculée et bousculante d’un homme qui porte une dualité, qui a été témoin tout en étant acteur. Godin est un poète qui a fait de la politique par conviction. Il a fait les deux de front avec beaucoup de rigueur et d’honnêteté. Mais le personnage, un peu comme Ferron, a éclipsé le poète."
Christian Vézina ne se contente pas de porter les mots, mais cherche à transposer sur la scène un univers tangible, une lecture en trois dimensions. "Je voyais au départ un travailleur, ce qui m’a rapidement donné l’idée des échafaudages. J’aime cette idée du monde en chantier de Godin, son projet de transformer le monde, de transformer la langue. Cette scénographie me pousse à un jeu très physique. Par ailleurs, il y a des éléments de style très troublants, comme ces passages du je au il, comme si Godin regardait sous plusieurs angles, ce qui est intéressant à transposer scéniquement. La poésie étant déjà une métaphore en soi, il faut que la métaphore scénique qu’on en fait soit très concrète."
Tout semble donc mis en œuvre pour faciliter la vulgarisation. Outre le fait que Vézina a choisi de faire un tour d’horizon de l’homme qu’était Godin, les cassures qui en résultent promettent des surprises. "Le côté plus hachuré me permet surtout des jeux scéniques nouveaux. La poésie a déjà tellement mauvaise presse à cause de l’incompréhension qu’elle suscite que je serais fou de rajouter des obstacles, poursuit Vézina. Je crois surtout qu’il faut arrêter de "dire" la poésie et plutôt s’efforcer de "parler" aux spectateurs. C’est mon défi toujours renouvelé."
Du 25 au 27 mars et du 1er au 3 avril
Au Théâtre La Chapelle
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