Mariko Tanabe : Chambre avec vue

Narcisse en silence est le résultat d’une étroite collaboration artistique entre le scénographe d’origine tchèque Jan Komarek et Mariko Tanabe. Les deux artistes ont uni leurs forces, tout au long du processus de création, dans le but que cette production ait une grande unité d’ensemble. "Nous avons tout créé à deux, raconte la chorégraphe. C’est la première fois que je procède de cette manière. Je trouve que ça apporte beaucoup de liberté, car le fait d’avoir accès aux éléments visuels dès le début du travail de création nous plonge rapidement dans l’univers potentiel de la pièce." Cette scénographie visuelle (costumes, décors et éclairages) qui se résume à l’essentiel est, selon la co-conceptrice, simple et efficace. Les quelques éléments qui la composent servent à mettre en place l’univers intime d’une chambre à laquelle le spectateur a accès, un peu à la manière d’un voyeur.

Le mythe de Narcisse est revisité par la danseuse selon un point de vue très contemporain, qui tient compte de ce qui anime les relations homme/femme actuelles. "Ce Narcisse est en silence, parce que cela met en relief les notions d’intimité, d’introspection et d’isolement que la pièce et le mythe proposent. Il s’agit d’une œuvre qui traduit ce besoin qu’on a tous d’être aimé et désiré. Cela teinte d’ailleurs nos relations humaines. Je nous sens isolés plus que jamais, à notre époque, malgré les nombreux moyens de communication technologiques dont nous disposons. Et je crois que ce qui est le plus malheureux dans tout ça, c’est que la société de consommation profite de ce manque de désir pour faire encore plus d’argent en amplifiant ce sentiment de solitude et en renforçant notre volonté d’individualisme. Ceci, en créant des besoins superficiels relativement à ce manque, comme cette nécessité d’être toujours plus beau, d’avoir l’air toujours plus jeune, d’être encore plus populaire, etc."

Mariko Tanabe possède une sagesse intérieure qui se reflète jusque dans le propos de ses œuvres et, à notre grand plaisir, dans son interprétation toujours aussi juste et remplie d’intensité.

Du 7 au 10 avril
Au MAI