L’Hôtel du libre-échange : Résidence secondaire
La ligne directrice empruntée par la mise en scène que signe Normand Chouinard de l’une des pièces les plus conventionnelles du répertoire de Feydeau est sans nul doute l’abolition du quatrième mur. Des interventions en provenance de la salle par des comédiens "déguisés" en spectateurs aux chansons grivoises servant d’intermèdes, en passant par de franches adresses au public: tous les moyens s’avèrent bons pour mettre en évidence ou plutôt appuyer la théâtralité de la représentation. Ce long spectacle cherche si inlassablement à déclencher l’hilarité dans l’assistance que le comique d’accumulation dont il use à outrance finit par susciter l’exaspération. Précisons que cet état ne semblait manifestement pas partagé par la grande majorité des gens présents le soir de la première, puisque ceux-ci ont ri à gorge déployée pendant presque toute la soirée.
Il est impossible de recenser tous les clins d’œil, bruitages et effets dont la pièce est truffée. Leur récurrence donne parfois l’impression d’assister à de grand-guignolesques dessins animés. On ne serait d’ailleurs pas surpris d’apprendre que le spectacle constitue un hommage à l’évolution du genre burlesque à travers les âges. Si le jeu rencontre vite les limites de ce créneau obsolète, il faut avouer que les acteurs font preuve d’un sens du rythme irréfutable. Pendant que Benoît Brière et Pierrette Robitaille roulent sur leur fonds de commerce, plusieurs membres de la distribution parviennent à faire rire avec davantage de fraîcheur. Du quatuor central, Violette Chauveau est celle qui s’en tire le mieux. Parmi les rôles secondaires, Jean-Dominic Leduc et Catherine Trudeau démontrent des aptitudes incontestables pour le genre en nous offrant les rires les plus sentis de la soirée.
Endosser Feydeau à notre époque n’est pas une chose aisée. Il faut emprunter d’autres avenues que la caricature et éviter le cabotinage. En somme, trouver de véritables motivations à une dramaturgie souvent considérée comme limitée. Malheureusement, la mise en scène de Chouinard ne parvient pas à ce degré de réflexion. Sans d’autres préoccupations que de susciter le rire par les moyens les plus éculés, ce spectacle transforme l’endroit en un hôtel bien peu recommandable.
Jusqu’au 24 avril
Au Théâtre du Nouveau Monde
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