Alexis Martin et Daniel Brière : L’homme des tavernes
Pendant des années, ALEXIS MARTIN a écrit dans la lumière pâle et enveloppante des tavernes. En compagnie de son collègue DANIEL BRIÈRE, il nous entraîne dans le secret de ces univers parallèles.
Une taverne sous observation? Si le thème n’est pas nouveau, la plume tragicomique d’Alexis Martin nous propose un bien singulier bestiaire inspiré de ses rencontres. Daniel Brière, son double complice, assure quant à lui la mise en scène de ces Tavernes au Nouveau Théâtre Expérimental, dont ils sont tous deux co-directeurs artistiques.
"La taverne est un lieu de dépossession, mais aussi un lieu qui ne filtre pas les entrées, au contraire des endroits chic et branchés", nous dit d’entrée de jeu le comédien et auteur qui avoue avoir lui-même écrit dans ces lieux durant plusieurs années. "On peut y voir des étudiants comme des ex-détenus. C’est un lieu de transit intéressant où se retrouvent les gens qui ne savent pas où aller en ville et il y règne une ambiance chaleureuse qui favorise la confession."
Alexis Martin choisit donc d’incarner différents types d’hommes qu’il y a croisés, tout en jouant également le rôle d’un père comme narrateur. "Quand on a un enfant, on a envie de lui raconter le monde, nous dit l’acteur. Cette galerie de personnages, c’est un peu comme un cadeau de bienvenue, une façon de dire comment je perçois la vie. Je ne suis pas quelqu’un qui croit à la recherche de l’équilibre. Je crois plutôt que nous sommes toujours en déséquilibre de la naissance jusqu’à la mort et que ce n’est pas facile de vivre." Il ajoute que le catalyseur des sept personnages sera la capacité de fuir. "Je ne vois pas la fuite comme quelque chose de négatif mais plutôt comme quelque chose d’imaginatif. La fuite prend des formes plus ou moins drôles, des formes pathétiques ou plus poétiques parfois. Il y a des fuites qui sont presque des œuvres d’art."
Pour sa part, Daniel Brière souligne les écueils à éviter: "Je dois préserver le côté très intime du spectacle. On se sert de tout ce que l’on retrouve dans une taverne, les télés, l’écran, mais ça reste low-tech malgré tout. Loin d’une représentation réaliste, on se sert du lieu pour ménager des surprises, en particulier pour ce qui est des entrées ou des transitions entre les personnages. La virtuosité n’est pas technique, elle est dans l’interprétation d’Alexis."
Ivresse des profondeurs
L’acteur, qui sera seul en scène durant une heure et demie, exploitera également le chant et la danse pour les besoins de certains personnages. "Il y a des personnages très physiques, poursuit Daniel Brière, comme cet homme qui a appris à esquiver les coups tout au long de son enfance. Alexis doit trouver l’homme-caoutchouc en lui", explique-t-il en jetant un regard taquin à son acolyte. "Mon travail est d’écrire une partition musicale du texte et des personnages, y souligner les mouvements, les crescendos. Je suis l’œil extérieur ou l’éclaireur, mais j’aborde cela de façon très respectueuse parce que c’est un spectacle très lié à Alexis."
Le projet ne date pas d’hier. Une soirée diaporama organisée par Diane Dubeau nous a déjà présenté un Alexis Martin commentant des photos de tavernes prises par… Daniel Brière! "C’est Jean-Pierre (Ronfard) qui m’a proposé d’en faire un spectacle par la suite", raconte Alexis Martin, visiblement enchanté de retravailler avec son collègue et démontrant une fois de plus l’ambiance quasi familiale qui règne au NTE. "On essaie de demeurer un collectif créateur, de garder l’idée de décloisonnement", renchérit Daniel Brière.
Alexis Martin souligne quant à lui que ça ne se fait pas sans mal. "C’est la spécialisation des tâches que nous remettons en question. Ce serait facile de tomber dans le piège de la recette efficace, mais il faut pouvoir revenir à des structures déstabilisantes pour ne pas se répéter…"
Du 20 avril au 15 mai
À Espace Libre
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