La Fête des morts : Rite de passage
Scène

La Fête des morts : Rite de passage

Depuis toute jeune, CÉLINE BONNIER, comme sa complice NATHALIE CLAUDE, est attirée par les cimetières. Elles ont tiré de cette fascination un spectacle créé par le Théâtre Momentum en octobre 2002: La Fête des morts. Elles en signent texte et mise en scène.

Fruit d’un travail collectif, La Fête des morts invite à un parcours inusité. Présenté le soir venu dans un cimetière, le spectacle propose la rencontre de revenants qui, surgissant entre les pierres tombales, présentent "une suite de tableaux qui peuvent ressembler à des tableaux de rêve; sans être descriptifs, ils expriment une couleur générale à travers tout le spectacle", explique Céline Bonnier.

Pour créer le spectacle, les artistes ont beaucoup travaillé à partir de leurs propres expériences. "Dans ce collectif-là, on a tous vécu des deuils importants – père, mère, chum, blonde. Je pense qu’on a créé quelque chose qui représente peut-être ce qu’on voudrait voir de la mort, ce qu’on espèrerait que ce soit. Donc c’est assez doux, poétique, assez sympathique, ma foi. Franchement, le travail s’est fait dans le bonheur; on a même ri beaucoup."

Originale et audacieuse, La Fête des morts touche un sujet qui fait souvent figure de tabou. Si, au Québec, on veillait autrefois les morts à la maison, si on fréquentait les cimetières, de nos jours, par pudeur ou par peur, on parle peu de la mort. Plusieurs cultures, pourtant, l’entourent de rites colorés, joyeux, qui ont inspiré les créateurs. "On est partis entre autres de la Fête des morts, une tradition mexicaine. Chaque année, à la même date, les gens se consacrent à la mémoire de leurs proches qui sont disparus. Ils vont manger, boire et célébrer sur leur tombe. On s’est parlé aussi de traditions irlandaises, italiennes ou africaines. Ce sont des fêtes très colorées, par lesquelles on prend le temps de faire vivre encore la personne disparue. On s’est aussi inspirés de poésie, de différents textes et même, d’épitaphes. Notre but, c’était vraiment de s’approprier ce mystère-là."

Ce travail, semble-t-il, a aussi permis d’apprivoiser la mort à plus long terme. "Les comédiens nous disaient: "Maintenant, quand je pense à la mort, ou à quelqu’un que j’ai perdu, c’est plus doux, parce que je l’imagine autrement, parce que maintenant, j’ai d’autres correspondances, d’autres références." De jouer au cimetière, aussi, c’est très imprégnant pour le corps. Certains comédiens avaient un peu de misère avec le lieu au début; ils marchaient sur la pointe des pieds, presque. À la fin, tout le monde s’en allait dans son coin, sans lampe de poche; c’était rendu notre lieu. Et de voir le cimetière autrement, ça change forcément notre relation avec la mort. Pour le public aussi, c’est une expérience. Parce que tu marches parmi les tombes, dans ce lieu vibrant de sensations inconnues et étranges. Et le spectacle nous fait vivre parmi des morts qui ont l’air quand même à se débrouiller assez bien!"

"On est comme des enfants qui rentrent dans une pièce obscure, où on n’est pas supposé rentrer, glisse Céline Bonnier. C’est un grenier qu’on ne connaît pas, la porte est barrée. Pour Nathalie et pour moi, pour les comédiens, c’est ça, et je pense que pour la majorité du public qui s’abandonne le moindrement, c’est pareil. C’est "je ne suis pas supposé être là, je trouve ça épeurant un peu mais en même temps, c’est excitant; j’aime pas, j’aime.""

Du 19 au 22 mai
Dans un cimetière
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