Martin Desgagné : Dialogue de sourds
Depuis sa sortie du Conservatoire de Montréal en 1996, MARTIN DESGAGNÉ est presque aussi présent au théâtre qu’au cinéma et à la télévision. En prenant part à Bill 101, le jeune comédien prolonge sa complicité artistique avec l’auteur et metteur en scène YVAN BIENVENUE.
Christian St-Pierre
Photo : Ève K. Tremblay
Révélé au grand public en 1998 par le long-métrage de Rodrigue Jean Full Blast, Martin Desgagné collabore pour la première fois avec Yvan Bienvenue en l’invitant à participer au projet 4X4, un concept audacieux produit en 2001 par sa propre compagnie, le Théâtre Officiel del Farfadet (TOF). Depuis, les deux créateurs n’ont jamais vraiment cessé de faire appel l’un à l’autre. Pas étonnant que pour créer Bill 101, sa première "longue" pièce depuis cinq ans, Bienvenue ait sollicité les services du jeune acteur.
Dans cette satire débridée de la question linguistique, Desgagné incarne Philippe, un documentariste fauché qui répond, sans le savoir, à une offre d’emploi du Regroupement des Eugénistes Francophiles. "D’un point de vue dramatique, il s’agit du personnage central de la pièce, dit-il. C’est l’élément perturbateur avec qui les autres protagonistes interagissent." Le hasard fait bien les choses, puisque ledit réalisateur travaille au même moment à l’élaboration d’un documentaire sur le statut de la langue au Québec. Disons que ses démêlés avec la directrice de l’organisation (Renée Cossette), les membres de la Police de la Langue Française (André Ouellette et Jacques L’Heureux) et Bill (Paul Stewart), le commerçant accusé d’affichage unilingue anglophone, devraient servir d’inspiration à son projet cinématographique. Comme le fait remarquer le comédien, "Yvan remet la question linguistique sur la table. L’une des pires choses qui pourraient se produire, c’est qu’on cesse d’interroger la situation du français. En offrant une multitude de points de vue opposés, la pièce oblige le spectateur à prendre position dans un débat intellectuel et émotif".
Si les affrontements idéologiques foisonnent, il ne faudrait pas croire que la création mérite l’étiquette de théâtre à thèse. "C’est un mélange très incarné d’idées et d’action, explique l’artiste. Les échanges sont rapides et tendus, les répliques se chevauchent, l’énergie est continue. Une violence physique, mais surtout psychologique s’établit entre les personnages. Comme ce regroupement n’existe pas dans la réalité, on peut s’attendre à tout de la part des individus qui le composent." Après de nombreuses incursions dans l’univers de Bienvenue (en tant que metteur en scène aussi bien qu’acteur), Martin Desgagné commence à cerner les raisons qui expliquent ses affinités avec cette dramaturgie: "Je considère qu’il y a une prise de parole dans le choix d’un projet, même pour un interprète. Le théâtre d’Yvan met en garde quant aux débordements de l’extrémisme, qu’il soit religieux, culturel ou autre. C’est un discours auquel j’adhère et que je suis en mesure de défendre."
Du 25 mai au 19 juin
À Espace Libre
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