Passare de O Vertigo : Vertiges et vestiges corporels
Scène

Passare de O Vertigo : Vertiges et vestiges corporels

Le Festival Danse Canada s’ouvre pour sa 10e édition sur la pièce Passare ou Une autre forme pour l’infini de O Vertigo. La compagnie célèbre par la même occasion ses 20 ans de succès à l’échelle internationale avec la toute dernière œuvre de la chorégraphe de talent GINETTE LAURIN.

La pièce Passare ou Une autre forme pour l’infini s’inscrit dans la recherche artistique que la chorégraphe Ginette Laurin avait entreprise avec Luna (2001) et prolonge son travail d’exploration de l’infiniment grand et de l’infiniment petit avec l’astrophysicien Claude Théoret. Dans cette nouvelle création, elle s’intéresse surtout aux traces que le corps laisse dans le temps et dans l’espace en les liant aux vestiges laissés par d’autres structures dans l’univers. Inspirée, Ginette Laurin se renouvelle et se nourrit à chaque création en joignant la technologie à ses œuvres. Dans Passare, elle a travaillé avec la vidéaste Oana Suteu pour ajouter une dimension visuelle de séquences préenregistrées et en direct sur écran de fond. "Pour moi c’est pas essentiel que le spectateur sache d’où viennent les images, parce que je pense qu’intuitivement il va saisir les choses, l’ensemble", clame la chorégraphe, qui ajoute que Passare est une pièce plus émotive que ses créations habituelles. "Luna avait une structure plus linéaire, alors qu’ici, je travaille sur les traces, la mémoire, le souvenir… Dès qu’on essaie de se rappeler un souvenir, notre cerveau ne travaille pas de façon linéaire. Ce dont on se souvient est souvent bien loin de la réalité. J’ai essayé dans ma structure chorégraphique de jouer avec ça, alors par moments les spectateurs ont l’impression que je veux les emmener à tel endroit et ça bifurque ou il y a une coupure pour aller vers quelque chose d’autre, comme s’ils rêvaient éveillés…" La pièce entraîne donc le spectateur dans des jeux, souvent humoristiques, de répétitions dont il peut noter les changements. La chorégraphe s’intéresse également au "corps-architecture" où elle questionne la mémoire du corps à l’aide de sculptures de métal rigide porté par les danseurs ou qui restent parfois vacantes, pour ainsi donner vie au vide ou à la forme du corps.

Neuf danseurs forment la distribution de cet opus dont la trame musicale, ajoutée à la chorégraphie, a été écrite par le compositeur new-yorkais Peter Scherer. Avec une trentaine d’années d’expérience en tant que danseuse professionnelle et chorégraphe, Ginette Laurin célèbre cette année les 20 ans de la compagnie qu’elle a fondée et dont elle est la directrice artistique. "Le corps humain est une machine formidable et c’est certain que je n’ai pas fini d’en faire le tour!" explique l’artiste qui regrette que les festivals canadiens éprouvent des difficultés ces derniers temps par manque de subventions. "C’est drôle qu’on ait tant de supporteurs européens alors qu’ici on a de la difficulté à supporter les Canadiens. Il y a un manque de réciprocité à ce niveau-là."

La forme de l’infini
La première mondiale de Passare a eu lieu en France en avril dernier dans le cadre de Lille 2004 et la troupe a ensuite donné une représentation en Autriche et aux États-Unis. "On se confronte à une autre culture et ça aide beaucoup à clarifier le message, à rendre la danse la plus universelle possible. Je veux que ma danse soit accessible et qu’elle touche tout le monde, alors c’est une façon de vérifier." Dans le dépliant du Festival, une inscription précise, pour les plus prudes, que le spectacle contient de la nudité, une annotation qui a pris des connotations différentes selon le pays. "Je n’utilise pas la nudité pour provoquer. C’est plutôt un élément particulier dans le spectacle où un solo est répété avec plusieurs danseurs ayant une tenue vestimentaire extravagante. Une des danseuses est nue avec des ailes sur le dos. La danseuse qui exécute cette séquence a la peau très blanche; pour moi, c’est une métaphore de la pureté plus qu’une provocation sexuelle", renchérit la chorégraphe, qui précise qu’elle ne cherche pas à faire disparaître le tabou, mais que la nudité est utilisée dans ce cas-ci comme un costume en soi.

Après sa participation au Festival Danse Canada, la production prendra part au Festival Montréal en lumière en février 2005. "C’est important pour les danseurs de la faire à plusieurs reprises, cela leur permet de "maturer" dans leur rôle, de rendre l’ouvre plus homogène", conclut Ginette Laurin.

Le 3 juin à 19 h 30
Au Théâtre du CNA