Pierre et Marie… et le démon : Un été sous le signe de l'enfer?
Scène

Pierre et Marie… et le démon : Un été sous le signe de l’enfer?

Elle s’installe au théâtre pour l’été. La pièce de MICHEL MARC BOUCHARD sera présentée du 1er juillet au 1er août par le Théâtre La Rubrique à la Salle Pierrette-Gaudreault. Quiproquos, drame et sens des valeurs s’y percuteront. C’est la deuxième année consécutive que La Rubrique met en scène une pièce de Bouchard. L’an dernier, c’était Le Désir, finaliste pour le Masque 2003 de la meilleure production en région. Pierre et Marie… et le démon en fera-t-elle  autant?

C’est une situation délicate qui a servi de prétexte à la nouvelle pièce de Michel Marc Bouchard. En effet, le lendemain d’une soirée bien arrosée, Pierre et Marie découvrent qu’un homme a pris place dans leur lit. Blaise, surnommé le démon, est tombé amoureux des deux lors de ce party qui fêtait la promotion de Marie. Le couple lui aurait d’ailleurs fait une promesse compromettante, dont il n’a aucun souvenir. Tout au long de la pièce, c’est le questionnement qui domine. Marie trouve que ce renouveau convient très bien à sa vie de couple tandis que Pierre se sent un peu décontenancé et espère retrouver sa Marie d’avant.

L’esprit qui dérange
En créant Pierre et Marie… et le démon, celui qui en est à sa 25e pièce en carrière s’est servi du couple pour parler de questions morales au public. "J’ai voulu créer une comédie d’été en amenant un outil politique qui sert à interroger les valeurs des gens, raconte Michel Marc Bouchard. Dans Pierre et Marie, j’interroge labi sexualité et les permissions qu’un couple se donne. D’un côté, on a ce couple très moderne, yuppie, un peu bourgeois; et de l’autre, on a l’avènement de Blaise (le démon) qui bouscule leur vie amoureuse. J’ai voulu voir comment cet incident vient troubler et ravigoter l’amour qu’ils ont l’un pour l’autre." L’auteur rassure tout de suite le public: "Dans Pierre et Marie, la fin est plutôt heureuse. Souvent, en amour, les relations de longue durée ont besoin d’accidents de parcours qui peuvent être dramatiques mais parfois heureux."

Le sens du tabou
C’est Benoît Lagrandeur qui assure la direction artistique et la mise en scène de la pièce. C’est lui qui, l’an dernier, avait porté sur les planches Le Désir. Il a tellement aimé le texte qu’il a décidé de réitérer avec l’auteur cette année. "J’avais le goût de revenir avec lui car je trouve qu’il a un sens du comique assez extraordinaire. Tout en utilisant la formule classique de la comédie, avec rebondissements, quiproquos et jeux de portes, il réussit aussi à toucher à des tabous sociaux… à des choses dont on n’ose pas parler."

Pour ceux qui s’inquiéteraient de la qualité de la pièce présentée en théâtre d’été, le metteur en scène ajoute: "C’est une comédie écrite pour le théâtre d’été mais avec une volonté qu’il y ait un fond de quelque chose… pas juste du claquage de portes et des "Je suis cocu! Je suis cocu!". Michel Marc Bouchard va plus loin que ça."

Du 1er juillet au 1 août
À la Salle Pierrette-Gaudreault

Blaise et Marie et Pierre
À la lecture de Pierre et Marie… et le démon, on découvre que les personnages de Michel Marc Bouchard sont très contradictoires. Pierre (Éric Chalifour) est propriétaire d’une garderie et désire revenir aux valeurs fondamentales du couple. Marie (Guylaine Rivard) est workaholic et carriériste. Les folies semblent l’attirer plus que son chum. Blaise (Dany Lefrançois), le mec d’un soir qui s’immisce entre les deux, est plus libertaire. Angéla (Josée Gagnon) la meilleure amie de Marie, est extrémiste et matérialiste, ne vit que pour le magasinage et verse dans l’exagération. La ministre (Johanne Grenon), c’est le rapport au travail, car elle aussi est vraiment un bourreau de travail. "C’est ce qui est agréable au théâtre: la confrontation entre les personnages. Dans ce sens-là, ils s’opposent de par leur vision des choses", raconte l’auteur.

Guylaine Rivard
Marie Lapointe, attachée politique de la ministre du Commerce extérieur, épouse de Pierre
"Marie est carriériste, voire workaholic. Elle est très heureuse en amour mais son travail prend beaucoup de place dans sa vie. Lorsqu’elle a rencontré son chum, elle était déjà très avancée dans sa carrière. Elle n’a pas vraiment fait de concessions. Ils vivent une très belle histoire… sauf qu’à un moment donné, la routine envahit le quotidien. Alors leur couple prend un peu le bord… mais l’étincelle est toujours là. Le jour où le couple se réveille avec un jeune homme, ça la bouscule beaucoup mais du bon côté, c’est-à-dire que ça l’allume complètement. Elle est comme dans un high… elle a eu une promotion, elle va super bien et ce beau jeune homme apparaît. Elle voit une possibilité de relancer sa vie de couple, contrairement à Pierre, qui prend ça négativement, avec énormément de réserve. Mais pour Marie, ça va très, très bien. Elle serait prête à essayer ça, elle… avec les deux autres. C’est une surprise dans sa vie mais elle le prend positivement… ça vient mettre du piquant. Marie est convaincue que ce qui arrive va être bien pour eux."

Et les héros?
"Les personnages sont spontanés, la répartie est très rapide. Marie est vraiment du tac au tac, elle manipule beaucoup mais jamais de façon malsaine… elle est naïve et elle est prête à conter des petits mensonges de temps en temps pour faire avancer ses affaires. Ce qui est plaisant avec les personnages de Michel Marc, c’est qu’ils sont un peu des deux côtés… un penchant dramatique avec un brin d’humour."

Guylaine Rivard est connue comme comédienne, mais elle est aussi fondatrice du Théâtre CRI. C’est la deuxième fois qu’elle tient un rôle dans une pièce de Michel Marc Bouchard. Des vacances en famille l’attendent après la pièce, avant de reprendre la production L’Opération du Théâtre CRI à l’automne.

Éric Chalifour
Pierre Brisebois, propriétaire d’une garderie privée, époux de Marie
"Pierre aimerait que ce soit encore le romantisme qui prime dans le couple. Il se rappelle avec nostalgie les promenades qu’il faisait avec sa blonde, les sorties dans les librairies… il prenait le temps de vivre. Mais depuis que Marie a une nouvelle carrière, le couple n’a plus le temps de rien faire, alors Pierre est triste et voudrait que ça revienne comme avant… il est très nostalgique du passé, très troublé aussi. Il voudrait qu’il y ait du renouveau dans leur couple… mais pas celui qui arrive dans la pièce. Oui, ça met de l’action, du piquant, mais lui, ce qu’il veut, c’est retrouver sa femme. Cette aventure à trois qu’il a probablement eue lui amène beaucoup de questionnements supplémentaires, il ne sait plus du tout où il s’en va. Il veut comprendre ce qui se passe, pourquoi il n’est plus heureux dans son couple."

Et le public?
"Je pense que chaque personnage répond à son questionnement intérieur grâce à ce fameux démon qui s’est immiscé dans ce couple déjà un peu plate. Le public va peut-être se poser des questions à son tour, sur l’importance de s’occuper de l’être aimé pour ne pas sombrer dans la torpeur de la routine."

C’est la première fois qu’Éric Chalifour joue du Michel Marc Bouchard. Il a créé entre autres Le Marcheur de rêve avec le Quatuor Alcan, a fait la mise en scène de la comédie musicale Le Violon sur le toit, et s’apprête à travailler sur La Serva Amorosa, présentée par le Théâtre 100 masques en août. Après un mois de vacances bien mérité, ce comédien et metteur en scène très actif dans la région aura sûrement un automne chargé.

Blaise par Dany Lefrançois
"Le personnage représente le démon, mais c’est plus la tentation qui sème la pagaille entre Pierre et Marie. Il est libre, un peu inconscient… assez jeune dans sa façon de voir la vie. Il est aussi à la recherche de sa propre identité, de l’idéal. En fait, lorsqu’il a vu le couple avoir autant de plaisir lors du party, il s’est dit que ça faisait très longtemps qu’il n’avait pas entendu des gens rire comme ça. C’est ce qui a fait qu’il est tombé en amour avec eux… avec leurs qualités, leurs défauts, leurs vérités."

Osé, Michel Marc Bouchard?
"Le texte de Michel Marc est écrit dans une langue qui rejoint beaucoup le public de la région. On ne sait jamais ce que pensent les personnages… il y a toujours des sous-entendus. C’est ce qui fait le comique de la situation, ce qui fait que c’est un théâtre d’été intelligent. L’histoire tourne autour de la remise en question du couple Pierre et Marie, et c’est Blaise qui vient la provoquer. La pièce traite de l’amour à trois, oui, mais le fait que Pierre n’adhère pas à ça et se sente bousculé va toucher bien du monde. C’est un thème qui est d’actualité. On pourrait penser que c’est risqué car c’est quand même osé… ça suscite de l’intérêt. Il va y avoir beaucoup de bouche à oreille car ça pique la curiosité du monde."

Dany Lefrançois a vécu de théâtre dans la région jusqu’à l’an dernier, après quoi il est allé au Conservatoire d’art dramatique de Québec. Il est de retour pour la pièce. Il a beaucoup de projets de création en cours. Après Pierre et Marie… et le démon, il croit bien pouvoir réaliser un de ces rêves, celui de monter un show qui se promènerait partout.