Je ris… moi non plus : Jeux de société
L’année dernière, Marc Thibaudeau portait à la scène Urbanités, la toute première adaptation française de SubUrbia, une œuvre controversée de l’États-Unien Eric Bogosian (Talk Radio). En s’attaquant avec Jacqueline McClintock aux courtes pièces du Torontois Jon Rannells, réunies sous le titre de Je ris… moi non plus, le jeune acteur de formation embrasse cet été un univers plus léger, mais tout aussi cinglant.
Adaptées par Martin Thibaudeau, comédien et directeur artistique du Théâtre de la zone grise, ces partitions lapidaires présentent un savant dosage d’humour et de réalisme. Chacun des huit tableaux propose une désopilante rencontre, un instant dans la vie d’un duo (amis, amants, collègues de travail…) voué à un affrontement haut en couleur. Employant les traditionnels ressorts de la comédie de situation, les dialogues de Rannells tordent les stéréotypes afin de traduire avec intelligence et fraîcheur les incertitudes amoureuses et professionnelles des trentenaires d’aujourd’hui. Pour insuffler à ces huit brèves théâtrales le rythme et la précision nécessaires, les metteurs en scène ont bénéficié du talent manifeste de leurs jeunes interprètes. Aussi lestes au théâtre qu’au petit écran, les sept membres de la distribution soutiennent sans effort une représentation qui s’appuie quasi exclusivement sur l’efficacité de leur jeu.
Sur un plateau exigu, dans un décor minimal et sous l’éclairage de quelques projecteurs, les acteurs parviennent à captiver par la seule rigueur de leurs échanges. Dans la peau d’une femme d’affaires aussi sensuelle que déterminée, Marie Turgeon fait preuve d’une poigne peu commune. Tout aussi savoureux, le personnage de Judith Baribeau annonce froidement à son conjoint qu’elle a cessé de l’aimer. Du côté des garçons, Érik Duhamel revisite avec doigté l’archétype du collègue de bureau détestable, tandis que Marc Bélanger exprime avec authenticité le dilemme du mari fidèle soumis à la tentation. Exposant sous un nouvel angle les rouages parfois bien retors de la nature humaine, voilà certes une enfilade d’histoires saugrenues et éclairantes dont on repousserait indéfiniment la conclusion.
Jusqu’au 24 juillet
À la Balustrade du Monument-National