Rencontre Louisette Dussault : Conte de fées
En 1978, LOUISETTE DUSSAULT participe à l’écriture de certaines des plus belles pages de notre histoire théâtrale en prenant part à la tumultueuse création des Fées ont soif. Un quart de siècle plus tard, la comédienne renoue avec l’œuvre phare de DENISE BOUCHER.
Aussi engagée artistiquement que socialement, Louisette Dussault s’est battue sur tous les fronts à la fois. Si la Souris verte a fortement marqué l’imaginaire d’une génération, la feuille de route de cette pionnière compte des réalisations bien plus marquantes. De la première lecture publique des Belles-Sœurs à La Nef des sorcières, l’une des plus mémorables prises de parole féministes au Québec, en passant par Moman, un solo décapant sur la maternité, l’artiste a touché à tout avec talent et lucidité.
En 1978, elle se joint à Sophie Clément et Michèle Magny et endosse le rôle de la statue dans Les Fées ont soif de Denise Boucher. En acceptant de monter sur la scène du TNM (alors audacieusement dirigé par Jean-Louis Roux) pour donner une voix dénonciatrice à la Vierge Marie, l’actrice est loin de soupçonner l’ampleur de l’impact de ce qu’elle s’apprête à faire. Lorsque le Conseil des arts de la ville de Montréal, jugeant le texte de Boucher irrecevable, retire au TNM la subvention qu’il devait lui accorder, un véritable débat de société s’enclenche à propos de la censure. Des mois avant que la mise en scène de Jean-Luc Bastien ne soit dévoilée au grand public, la pièce plonge la province dans une vaste polémique. Malgré un succès public manifeste, le début des représentations ne fait qu’accroître les tensions. "Nous savions que le spectacle était provocant, raconte Louisette Dussault. Il s’attaquait aux stéréotypes féminins, s’insurgeait contre le peu de rôles offerts aux femmes. Pourtant, nous n’avions pas prévu ce qui s’est produit. Nous arrivions après La Nef, après la Révolution tranquille, on ne pouvait pas imaginer que la pièce allait réveiller tous ces mouvements de droite en 1978!" La vive opposition du clergé offrant une publicité exceptionnelle, les représentations se poursuivent et le spectacle entreprend une tournée. "Chaque soir, il y avait un débat dans la salle, se rappelle la comédienne. Je pense que nous avons fait bouger les choses, changer les mentalités."
Pour sa première édition, le Festival international des femmes de Montréal, ou Festiv’Elles, célèbre le 25e anniversaire des Fées ont soif en organisant une lecture dirigée par Louisette Dussault et précédée d’une table ronde. "La pièce n’a pas vieilli, affirme celle qui tenait à souligner cet anniversaire. La situation des femmes a changé considérablement, mais elle trouve encore de nombreux échos chez les trois personnages." Ayant minutieusement choisi ses comédiennes – Chantal Baril (la statue), Carole Chatel (Madeleine) et Chantal Beaupré (Marie) -, la metteure en scène promet une lecture qui donnera toute la place au souffle, aux images et aux magnifiques envolées qui caractérisent la langue de Denise Boucher.
Le 15 août
Au Théâtre Plaza
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