Julie Beaulieu : Amère America
De retour de l’Inde, Julie Beaulieu crée Trivium Express à Tangente, un carnet de voyage alliant danse et musique.
Partie il y a un an, accompagnée de son partenaire de vie et de scène, le musicien Jonathan Voyer, dans cette partie de l’Orient que les Occidentaux qualifient souvent de chaotique, Julie Beaulieu revient la tête chargée d’images. Malheureusement, ces images n’ont pas toutes l’allure des cartes postales que l’on achète dans les boutiques des aéroports. Elle a vu la mort de près, comme il n’est pas imaginable de la voir ici. Puis, de la pollution… énormément de pollution. Les gens en sont malades en permanence. Elle-même en perdait ses cheveux après seulement un an passé là-bas. Le pire, me dit-elle, c’est que les coupables de tout cela sont des grandes compagnies américaines et canadiennes.
"J’avais constamment envie de m’excuser d’être, en partie, la cause de leur malheur. Pourtant, je ne rencontrais aucune hostilité dans leur regard." La jeune chorégraphe-interprète et son collaborateur avaient planifié ce voyage dans le cadre d’un projet d’échange artistique sur le thème de la non-violence. Ils ont alors suivi de nombreux stages. Elle, de danse et lui, de musique; notamment, de Bharata Natyam (danse) et de musique Hindustani. Ils ont également fait du bénévolat dans certaines institutions locales.
L’endroit où ils sont restés le plus longtemps, c’est dans la province du Karnataka, un haut lieu de ces genres de musique et de danse traditionnelles. Ils gardent d’ailleurs d’heureux souvenirs de l’hospitalité et de la sagesse des habitants de la ville de Dharwad. "Là-bas, quand tu es un artiste, tu es considéré comme quelqu’un d’important, car l’art est sacré. Il y a toujours de la musique traditionnelle qui joue à longueur de journée à la radio. Aussi, en Inde, la culture est si accessible que nous avons pu voir un lot de spectacles sans que ça nous coûte notre chemise. Ça fait bizarre de revenir à Montréal et d’être un nobody dans l’échelle sociale; de ne pas avoir assez de subvention pour qu’un seul petit spectacle de quatre soirs ne soit pas déficitaire et d’être trop pauvre pour pouvoir se permettre d’aller voir les productions de nos pairs." Une constatation bouleversante de vérité.
LE MEILLEUR DES MONDES
Trivium Express est une rencontre entre ces deux pôles d’une même planète. Un moment de suspension, de réflexion sur les différents aspects d’une complémentarité, tels le féminin et le masculin, la musique et la danse, l’Orient et l’Occident… "Quand nous faisons un run du spectacle, nous avons l’impression de revivre des moments de notre voyage. Parmi ceux-ci, il y avait ce tiraillement constant entre d’où nous venions et ce vers quoi nous allions." Mais Julie Beaulieu tient à le préciser, si le propos de cette pièce part d’un questionnement sur la possibilité de transmettre un message de non-violence à travers une œuvre artistique, il ne s’agit pas d’un documentaire artistique du style Vision mondiale. "Le genre de non-violence que nous avons décidé d’aborder est plutôt un message de partage entre des éléments de nature différente. De cette façon, nous avons tenté d’aller l’un vers l’autre, Jonathan et moi, lors de la création du spectacle. Je le fais danser, il me fait chanter." Dans cette optique, nous pouvons dire qu’écouter et accepter l’autre, au-delà de ses différences, c’est déjà un premier pas vers la non-violence.
C’est donc dans l’atmosphère d’un petit havre de paix, concoctée par ces deux amoureux d’art, que nous pourrons apprécier une danse contemporaine partiellement influencée par l’exotisme des sinuosités orientales et une musique folklorique agrémentée par la sonorité étrangère du santoor (instrument à cordes d’Orient) et de l’harmonium indien.
Du 16 au 19 septembre
À Tangente
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