Le Pont de Laurent Van Wetter : Sauter dans le vide
Scène

Le Pont de Laurent Van Wetter : Sauter dans le vide

Le Belge Laurent Van Wetter voit sa pièce Le Pont, un dialogue autour du suicide, montée pour la première fois au Québec par la jeune compagnie Makadam Cité.

On remarque avec joie la tendance actuelle des petites compagnies émergentes à se frayer un chemin dans le milieu théâtral professionnel. À ce titre, Makadam Cité, fondée conjointement par les acteurs Denis Faucher et David Fontaine, propose un lieu d’exploration aux artistes tous azimuts désireux de faire entendre leur voix sur la scène théâtrale.

La compagnie présente ces jours-ci Le Pont, du Belge Laurent Van Wetter, texte présenté pour la première fois en Amérique du Nord et mis en scène par Stéphane Bellavance. Variation édulcorée de la comédie L’Homme sur le parapet de Guy Foissy, le texte de Van Wetter relate la rencontre d’un homme désespéré désirant se jeter en bas d’un pont et d’un badaud s’amusant à déstabiliser le suicidaire par son verbiage.

Si Foissy profitait de l’occasion pour questionner la mise en marché de la souffrance, Van Wetter nous offre un douteux mélange où l’anecdotique reste étrangement juxtaposé aux réflexions prenant la forme de monologues vaguement parallèles. On cherchera longtemps la chair autour de l’os.

C’est donc avec un texte sans grande portée que Makadam Cité tente de tirer son épingle du jeu. Stéphane Bellavance réussit joliment à mettre en lumière les seuls bons moments du texte de Van Wetter en donnant vie à quelques dialogues amusants. La direction d’acteurs souvent juste nous offre un jeu de répliques savoureux, Fontaine et Faucher laissant entrevoir une complicité séduisante, et l’accentuation des stéréotypes se révèle un moteur comique efficace alors qu’un volontaire dérapage dans la caricature apparaît presque en clin d’œil. Toutefois, le jeu volontairement appuyé du personnage efféminé teinte le propos de l’auteur, se plaçant en porte-à-faux sans raison apparente.

Bellavance ne parvient pas à masquer la faible dimension tragique du texte, tandis que la réflexion sous forme narrative ne prendra jamais de dimension poétique sur scène. À ce titre, la scénographie ingénieusement évocatrice de Martin Richard sauve un temps l’entreprise, alors qu’une lourde lune éclaire le pont tel un ballon fatigué. Magnifique image qui perdurera, faisant oublier un peu l’absence de l’ange.

Jusqu’au 9 octobre
Au Centre culturel Calixa-Lavallée
Voir calendrier Théâtre