Roger Sinha : Livre ouvert
Scène

Roger Sinha : Livre ouvert

Le chorégraphe Roger Sinha présente au Studio de l’Agora sa toute nouvelle création, Apricot Trees Exist.

Pourquoi ce titre? "Il s’agit des trois premières lettres du poème Alphabet de la Danoise Inger Christensen", répond Roger Sinha. Quand on sait que celui-ci s’est inspiré de la littérature depuis sa toute première création Burning Skin (1992), cela n’a rien d’étonnant. Toutefois, il est intéressant d’apprendre que la structure rythmique du poème lui a servi de canevas de base pour créer son vocabulaire gestuel. "C’est même très mathématique comme structure, dit-il. Je suis préoccupé par deux choses lorsque je crée: le temps et le corps. C’est-à-dire le temps que cela prend pour dire la phrase en mouvement et le corps avec lequel on dit cette phrase."

On serait porté à croire que Roger Sinha, fils d’une mère arménienne et d’un père indien, est mû par un désir incontournable de faire transparaître ses origines exotiques à travers sa danse et que ce serait une des raisons qui l’ont poussé à utiliser, dans son travail, des mouvements inspirés du Bharata Natyam. "Pas du tout, affirme-t-il. Je n’ai pas appris la langue de ma mère. Je n’ai jamais habité l’Inde. Je ne suis pas non plus attiré par le côté culturel du Bharata Natyam. Pour moi, il s’agit d’une technique qui me sert à créer. Ce qui m’intéresse, c’est avant tout le rythme et la beauté du mouvement."

D’autre part, le côté athlétique de sa gestuelle serait tributaire de la formation en arts martiaux que l’artiste néo-montréalais aurait suivie avant d’entreprendre ses premières études en danse contemporaine, en 1983, à l’école du Toronto Dance Theatre. Maintenant âgé de 45 ans, avec un fils de 2 ans et demi et un autre enfant à venir (pour mars prochain), Roger Sinha se considère comblé par la vie. Il admet être moins centré sur ses tourments personnels et plus ouvert à son environnement. Un changement qui n’est pas sans avoir un impact certain sur sa création.

"C’est après la naissance de mon fils que j’ai réellement commencé à prendre conscience de ce qui m’entourait. Ça fait maintenant deux ans que je travaille sur ma nouvelle création et je peux affirmer avoir pris une tangente différente pour ce processus de création. J’ai laissé plus de place aux interprètes. Un peu à cause d’une blessure au pied, mais aussi parce que je me suis éloigné de mes préoccupations personnelles pour me concentrer davantage sur un travail de structure. J’ai donc établi un canevas de base et des directions claires à partir du poème. Ensuite, j’ai fait improviser les interprètes. Ensemble, nous avons bâti un vocabulaire très dense qui me plaît beaucoup."

Le poème en question traite du cycle de la vie et de la mort. La pièce se divise donc en deux parties: la première autour du rapport entre l’homme et la nature, pour représenter le cycle de la vie, et la deuxième autour du rapport entre l’homme et la technologie, symbolisant le cycle de destruction. "Un cycle de destruction nécessaire pour que survienne, par la suite, une période d’évolution, explique le chorégraphe. Ça a toujours fonctionné comme cela. La roue continue simplement de tourner…"

Une musique tantôt ambiante, tantôt rythmique et plus présente, composée par Bertrand Chénier, accompagne ces deux parties. Aussi, Roger Sinha (en anglais) et la comédienne Lise Roy (en français) prêteront leur voix pour la récitation du poème. "Si on était en Italie, je m’arrangerais pour qu’il y ait une partie en italien. Je le fais pour une question de représentativité. Pas nécessairement pour que les gens comprennent le texte. Car ce qui est beau selon moi dans ce poème, c’est avant tout la musicalité des vers. C’est d’ailleurs ce que j’ai voulu traduire en mouvement."

Du 13 au 16 et du 20 au 23 octobre
Au Studio de l’Agora de la danse
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