Circus minimus de Christian Bégin : Dernier tour de piste
Christian Bégin accouche avec Circus minimus d’un premier texte de théâtre.
Depuis sa sortie de l’Option-théâtre du Collège Lionel-Groulx en 1986, le comédien Christian Bégin a incarné au théâtre plusieurs personnages à sa mesure. Cette année, il obtenait le Masque de l’interprétation masculine pour son rôle dans La Société des loisirs de François Archambault, une production qui reprendra l’affiche à La Licorne en 2005. Après avoir écrit et interprété deux spectacles solos, I’ve Got a Crush on You ou J’ai une orangeade sur toi (1997) et Que reste-t-il de mes amours…? (1991), Bégin s’apprête à défendre Circus minimus, sa première véritable pièce de théâtre.
Dirigé par Dominic Champagne, Circus minimus est un drame pathético-comique mettant en vedette un clown (Bégin) et un homme-canon (Martin Drainville) au service du même cirque depuis 13 ans. Quelques heures avant de livrer leur dernière performance, enfermés dans une roulotte imaginée par Stéban Sanfaçon, Julie Castonguay (scénographie), Alain Lortie (éclairages), André Barnard et Ludovic Bonnier (musique originale en direct), les deux forains se préparent aux adieux. "J’ai collaboré pour la première fois avec Dominic Champagne sur Don Quichotte au TNM, explique Bégin. Ce fut une rencontre déterminante, où nous avons constaté que nos imaginaires se rejoignaient. C’est dans la création de Vacarmes, cabaret perdu que sont nés les deux protagonistes de Circus minimus. Ils n’ont pas été retenus, car ils ne correspondaient pas à la formule, mais Dominic est vraiment tombé amoureux de ces personnages et m’a demandé d’en faire une pièce. J’ai accepté sa proposition avec enthousiasme et angoisse."
Bien que ce duo beckettien hante l’acteur et que celui-ci brûle d’envie de lui donner de la chair, Christian Bégin goûte aux tourments de l’écriture. "Écrire pour le théâtre m’angoissait beaucoup. Au début, je me disais que ça allait être facile; ça fait 18 ans que je fais du théâtre, j’en ai lu et interprété des textes! Mais la construction de tout ça, c’est une autre paire de manches!" Heureusement, l’apprenti dramaturge bénéficie des précieux commentaires de ses collaborateurs. "Dans tout le processus de création, Dominic et Martin m’ont donné beaucoup de conseils, ils m’ont grandement aidé à écrire un meilleur spectacle. Ils ont été très participatifs, m’ont nourri et aidé à clarifier, à dire les choses sans les dire."
UN NOUVEAU MONDE
Lorsqu’on interroge le créateur sur la signification qu’il faut prêter aux déboires de cet étrange couple, dont les membres sont soudainement forcés de se questionner sur le sens de leur vie, la réponse ne tarde pas. "Pour moi, le vertige que ressentent ces deux hommes est une vision métaphorique de là où nous en sommes collectivement. J’ai l’impression que nous sommes à la fin de quelque chose, devant des choix cruciaux, à un point de non-retour. Il faut se questionner sérieusement, avoir le courage d’être conséquents, de poser des gestes qui vont appeler des renoncements importants."
Au regard de l’engagement dont l’acteur témoigne et des prises de position controversées qu’il adopte, comment ne pas voir son personnage de clown comme un alter ego? "Terriblement cynique, crachant son fiel et vomissant sa rage, le clown ne parvient pas à nommer ce qui le met en colère, précise Bégin. Je ne sais pas à quel point je me sers de lui pour dire ce que je veux dire. Je suis en colère, mais pas de cette manière-là. Le cynisme est une posture inerte, apathique, une position très confortable qui ne fait pas avancer. Pour changer la situation actuelle, il va falloir mourir à quelque chose, faire le deuil d’un monde. S’il est une chose que ce clown et cet homme-canon m’ont appris sur moi-même, c’est que je n’ai pas perdu l’espoir."
Du 19 octobre au 13 novembre
Au Théâtre d’Aujourd’hui
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