Émile et Angèle : Zone de libre-échange
La Maison Théâtre présente Émile et Angèle, une création basée sur la correspondance de ses deux créateurs.
L’un habite le Québec, l’autre la France. Par le biais d’une correspondance bien singulière, les auteurs-comédiens Joël Da Silva et Françoise Pillet ont toutefois tenté la création à quatre mains, malgré la distance géographique. C’est sur cette structure épistolaire que s’est construit le spectacle en lui-même, alors que pour les besoins de la cause, ils deviendront dans l’écriture et sur scène Émile et Angèle.
Émile reçoit donc un jour la lettre d’une fillette inconnue dans le cadre d’un projet du cours de français. Elle s’appelle Angèle et habite Paris. Il répondra, un peu ahuri, ne sachant pas trop ce qu’il doit écrire. S’ensuivra une série de lettres à travers lesquelles les deux enfants apprendront peu à peu à laisser couler leurs interrogations et leurs rêves dans l’encre des mots. Au fil du temps, les lettres distantes et scolaires (il faut entendre les résumés historiques particulièrement hilarants) deviendront des exutoires, toujours sur le ton léger de l’enfance, mais à travers lequel on peut soudainement percevoir les peurs et les envies. Jusqu’à ce que l’intimité devienne glissante comme le verglas.
Da Silva et Pillet ont donc misé sur le pouvoir évocateur des mots, la lecture des missives composant le texte dans son entièreté. Si la série de monologues qui résulte peut sembler risquée pour un public habitué à plus d’action, la mise en scène de Sylviane Fortuny démontre beaucoup d’inventivité afin d’y remédier. Da Silva fait également preuve d’une maîtrise étonnante, s’habillant de l’énergie enfantine de façon délicieuse.
La scénographie participe aussi à la focalisation alors que sur scène, on retrouve une grande table et un bocal. Rien ne vient entraver l’action principale: la naissance d’une amitié au fil des phrases. D’ailleurs, le public ne peut y échapper, tous les accessoires sont entièrement faits de papier à lettres, de la coutellerie au chandelier, en passant par les téléphones et… les rats. Une idée charmante, véritable écho au monde de l’enfance et du faire-semblant. Voilà qui donnera peut-être envie à certains de goûter au plaisir de l’écriture.
Jusqu’au 24 octobre
À la Maison Théâtre
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