Marc Béland : Gestes de survie
Scène

Marc Béland : Gestes de survie

Le comédien Marc Béland, après avoir fait une mise en lecture de L’Intimité l’an dernier, incarne le personnage d’Alex dans cette même pièce, montée maintenant à Espace Libre. Il nous en parle avec passion.

"Au début de la pièce, on voit une femme de 84 ans qui se meurt d’un cancer parce qu’elle a fumé toute sa vie, nous dit Marc Béland. À partir de là, on retourne en arrière et on découvre sa vie, celle de son mari, puis le rapport qu’ils auront avec leur enfant. Lui, brisé par la guerre, ne peut léguer quelque chose à son fils comme il le voudrait. Ce qui, évidemment, le blesse profondément. Cette pièce est une manière poétique de traiter des bouleversements que provoque l’arrivée d’un enfant et, à la fois, une métaphore de l’héritage, du legs."

L’auteure, l’Acadienne Emma Haché, en est seulement à sa troisième pièce, après Lave tes mains (2002) et La Vieille Fille à marier (2003). "Elle qui n’a pas 30 ans et qui n’a pas d’enfants écrit d’une manière très intéressante sur un couple en relation de dépendance. Elle lève des voiles sur notre réaction, comme civilisation, à l’arrivée d’un enfant. Elle parle de tout ce qu’un enfant peut éveiller comme blessures personnelles." Dans une mise en scène de Francine Alepin, qui présentait l’an dernier La Glaneuse de gestes, Markita Boies et Marc Béland incarnent donc Frauke et Alex, ce couple qui quitte l’Allemagne nazie pour devenir parents en sol canadien.

"C’est une écriture assez minimale, très précise, très concise, dont la structure narrative est très importante. L’agencement des courtes pièces est bien fait, l’enchaînement des scènes se déroule très rapidement. Ça met en scène deux personnages principaux dont celui que je joue, celui d’un jeune soldat qui se bat en Allemagne et qui rencontre une jeune Allemande, à peine plus âgée que lui. Ce n’est pas leur psychologie qui prime; tout est traité de façon assez poétique. On verra un garçon sous le choc, un jeune homme qui vit très brutalement la rencontre avec la guerre. Et au milieu de cette catastrophe, il fait la connaissance de cette jeune femme à laquelle il fera un bébé le soir de leur rencontre. Elle, elle est reconduite en sol canadien par la délégation canadienne et ils se retrouvent ici, où ils passeront leur vie commune, et où ils accueilleront leur enfant."

MISE EN COMMUN

Marc Béland, qui fut très impressionné par ce texte, avait émis le souhait de jouer ou de mettre en scène L’Intimité après en avoir fait une mise en lecture. Lui qui choisit scrupuleusement les pièces dans lesquelles il s’investit ne veut travailler que des textes le stimulant au moment présent. Père d’une fillette de quatre ans, il se sentait particulièrement interpellé. "C’est pourtant un objet qui, de prime abord, peut être rébarbatif", nous confie-t-il. D’après le comédien, qui possède un important passé de danseur, ce n’est pas une pièce très physique, contrairement à ce que pourrait laisser supposer son association avec la compagnie Omnibus, qui produit l’événement et qui accorde une grande importance au corps. "C’est très intéressant, ce que l’on s’apporte mutuellement. Francine a une approche plus kinesthésique, un regard sur les corps, leur fébrilité, leurs expressions, leur langage. Le chemin plus intérieur, c’est peut-être plus du domaine de Markita et de moi. Mais dans un minimalisme corporel, il y a toujours une charge, chaque geste devient signifiant. Et Francine est là pour voir ce qui est juste."

Du 23 octobre au 19 novembre
À Espace Libre
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