Duos pour corps et instruments : La maîtrise du son
Scène

Duos pour corps et instruments : La maîtrise du son

Dans Duos pour corps et instruments, trois danseuses à la féminité exacerbée établissent un dialogue avec le feed-back. Entrevue avec la chorégraphe Danièle Desnoyers.

Tout comme l’était Concerto grosso pour corps et surface métallique, que la compagnie Le Carré des Lombes nous avait présenté en 1999, le spectacle Duos pour corps et instruments est basé sur l’interaction entre le mouvement du corps et le son. L’atmosphère, en revanche, est bien différente. "Concerto…, c’était une œuvre de glace, c’était une œuvre d’hiver, précise la chorégraphe Danièle Desnoyers. Duos pour corps et instruments n’a pas du tout cette froideur-là. Et c’est beaucoup plus ludique."

Pour cette récente pièce, les trois danseuses manipulent le retour de son qui provient d’un moniteur. "On utilise tout l’appareillage de la guitare électrique, mais ce sont les corps qui sont connectés à cet appareillage, explique la chorégraphe. C’est grâce aux mouvements du corps que le son est produit. Ça demande énormément de contrôle aux danseuses, car le feed-back est une matière très volatile qui peut être extrêmement dérangeante. Elles doivent le rendre poétique, ce son-là."

Depuis sa création à Montréal l’an dernier, la pièce Duos pour corps et instruments est en demande dans les festivals européens. Le côté expérimental séduit évidemment un public averti, mais son caractère très spontané la rend accessible à un public plus vaste, comme le constate sa conceptrice au fil des représentations à Paris, Berlin, Francfort et Munich, ville d’où elle nous accorde d’ailleurs cette entrevue.

Le succès de la pièce tient aussi beaucoup, selon elle, à la qualité d’interprétation de Sophie Corriveau, AnneBruce Falconer et Siôned Watkins. "Elles sont très différentes. Il y a une sorte de chimie étrange entre elles. Il y a une étrangeté dans ce trio qui a beaucoup plu au public." À partir de la personnalité de ces trois femmes, la chorégraphe s’est amusée à démontrer qu’une image stéréotypée peut cacher une personne beaucoup moins conformiste qu’il n’y paraît.

Les mouvements de chacune des interprètes ont été développés en vase clos, puis la chorégraphe a superposé ces solos… ou plutôt ces duos. "Pour moi, ce ne sont que des duos pour le corps et ses instruments. Chaque interprète est liée à une station sonore et chacune va établir à un moment donné dans la pièce un dialogue avec ses instruments, créer un duo avec ses instruments." Bien que les danseuses ne jouent avec le son que de façon très ponctuelle, la pièce entière a subi l’influence de ces interactions.

Comme toujours chez Danièle Desnoyers, le travail des jambes est très fort. Le processus de création a même fait en sorte qu’il soit plus important et raffiné que jamais. "Les jambes sont le moteur de la danse. Le son émerge du sol et les jambes émergent du sol." Et dans ce cas-ci, il s’agit de jambes ultra-féminines. "Je n’ai pas cherché à les masculiniser, comme on le fait souvent en danse avec les femmes. Au contraire, j’ai exacerbé l’impact des jambes sur le corps, sur l’image de la femme."

Jusqu’au 6 novembre à 20 h
À la Salle Multi
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