Danse montréalaise 2004 : Sauts de l'ange
Scène

Danse montréalaise 2004 : Sauts de l’ange

Faste année pour la danse montréalaise, malgré l’absence du FIND… Retour.

Tout au long de l’année, des chorégraphes nous ont touchés, bouleversés, transportés, surpris, envoûtés, parfois déçus… Il est maintenant temps de souligner les moments importants que l’art du mouvement nous a permis de vivre. Je profiterai également de cette rétrospective pour rendre un dernier hommage aux "grands disparus" du milieu de la danse et pour féliciter une dernière fois celui qui a redonné du vent dans les voiles à la jeune danse montréalaise.

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LES BONS COUPS

À l’ouverture de la saison hivernale de l’Agora, Catherine Tardif nous a présenté Un show western qui a su me tenir en haleine du début à la fin. L’humour fin de la chorégraphe, la maturité des interprètes et la trame sonore parfaitement orchestrée par Michel F. Côté ont fait de ce spectacle un divertissement intelligent.

Un peu plus tard, ce fut au tour de Montréal Danse de me surprendre avec, dans la même soirée (troisième édition de la série Big Bang), deux coups de cœur: la gestuelle magnifique que la Coréenne Ae-Soon Ahn avait élaborée pour sa pièce On Second et l’interprétation majestueuse de la danseuse Manon Levac dans Le ciel, brûlant les heures, du chorégraphe José Navas.

Sylvain Émard m’a également séduit avec Pluie, présenté à l’Usine C en mars. Une œuvre complète, dans laquelle tous les ingrédients étaient en place pour nous faire goûter à ce rare sentiment d’unité entre les disciplines (danse, musique, éclairage et scénographie) mises en jeu. Le danseur Sylvain Lafortune m’a pour sa part totalement surpris et charmé dans Monsieur, d’Estelle Clareton, au Quat’Sous en mars. Ce maître du "pas de deux" a même réussi à nous émouvoir en dansant avec une chaise, à la toute fin de la pièce…

La présence généreuse et profondément touchante de Lucie Grégoire dans la pièce Eye (à l’Agora en mai), à l’intérieur de laquelle elle apparaissait avec une si belle fragilité aux côtés de Yoshito Ohno, a été pour moi une révélation. Quelle intégrité artistique! Encore bravo et merci pour ce moment de partage.

Puis, bien entendu, on ne peut passer sous silence la venue de Wim Vandekeybus et de sa compagnie Ultima Vez, dont le spectacle Blush (au Théâtre Maisonneuve en novembre) fut à la hauteur des attentes. Une gestuelle énergique, des interprètes audacieux, une scénographie efficace et bien utilisée (vidéo, poteaux, sacs en forme de blocs, etc.).

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LES GRANDS DISPARUS

Le samedi 18 septembre, s’est éteinte l’une des lumières du milieu de la danse canadienne, l’historienne Iro Valaskakis-Tembeck. Elle laisse derrière elle une contribution importante au domaine de l’histoire de la danse au Québec, dont le remarquable ouvrage de référence Danser à Montréal: Germination d’une histoire chorégraphique (1991).

Le vendredi 22 octobre, le danseur David Kilburn perdait la vie dans un tragique accident de la route. On se souviendra de lui pour ses rôles d’interprétation dans plusieurs pièces de Jean-Pierre Perreault et de Daniel Léveillé.

Le lundi 8 novembre au matin, je recevais un message qui débutait comme suit: "Lors d’une assemblée extraordinaire des membres du conseil d’administration tenue le 5 novembre 2004, il a été résolu de suspendre temporairement toutes les activités de la Fondation Jean-Pierre Perreault à compter de ce jour et jusqu’à nouvel ordre en raison d’importantes difficultés financières…"

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L’ESPOIR D’UN RENOUVELLEMENT

Ça ne peut pas aller mal pour tout le monde… Certains profitent donc d’un vent favorable pour hisser les voiles vers d’autres continents. Ce fut le cas du chorégraphe-interprète Dave St-Pierre (Pornographie des âmes), qui a réussi un tour de force en présentant le même spectacle, dans la même année, à la fois à Tangente, à l’Agora de la danse et à l’Usine C. Du jamais vu! Il semble être celui qu’on attend depuis un bon moment. En outre, son succès retentissant à Francfort et à Berlin lui a attiré la sympathie de plusieurs journalistes et diffuseurs européens et a mis en lumière la jeune danse montréalaise, comme ce fut le cas il y a déjà 20 ans avec les Perreault, Lock et autres. Serait-ce le début d’un nouveau cycle? Si c’est le cas, merci, Dave, de nous avoir rouvert cette porte!