Billy l'éclopé : J'ai quitté mon île
Scène

Billy l’éclopé : J’ai quitté mon île

Avec Billy l’éclopé, le coup de foudre pour l’Irlande se poursuit chez Duceppe…

C’est parmi des photos de paysans irlandais que Monique Duceppe parle de sa mise en scène de Billy l’éclopé. Des visages jeunes, vieux, les yeux brillants, des mains tenant la fourche ou la bière, des allées de galets, des rangs de pierre. La metteure en scène n’en est pas à son premier texte irlandais mais la chimie opère toujours autant. "Il y a plein de points communs entre le Québec et l’Irlande", explique-t-elle en regardant pour la centième fois les images sur le mur de la salle de répétition. "La religion et la politique ont toutes deux un impact sur nos sociétés, la famille… Québec et Irlande sont deux colonies, aussi. Même la musique celtique se rapproche beaucoup de la turlute. À la simple écoute, on a le petit pied qui part", lâche-t-elle, espiègle. "N’empêche qu’à l’époque, la vie était dure. L’espoir de réaliser ses rêves était beaucoup plus mince qu’aujourd’hui. Les gens n’étaient pas malheureux pour autant."

Après le succès du film La Grande Séduction (Ken Scott, 2003), Billy l’éclopé offre un retour à la tendresse des insulaires. Seulement cette fois, c’est en 1934 qu’on nous transporte. "Cette pièce démontre une vie où le temps ne passe pas, où l’on répète les mêmes choses, lit les mêmes livres ", explique Monique Duceppe. Mais un jour, les habitants apprendront que le documentaire The Man of Aran sera tourné sur une île voisine. Billy, le jeune handicapé de l’île, sera embauché par le réalisateur et aura la possibilité d’aller à Hollywood, laissant les autres sur place." La galerie de personnages qui se déploie alors ne manque pas de couleurs. "On y retrouve les deux tantes surprotectrices qui n’ont rien d’autre à faire que de tourner en drame la chose la plus insignifiante. Il y a celui qui troque les nouvelles du coin contre des produits alimentaires et qui tente depuis des années de tuer sa vieille mère en lui faisant boire de l’alcool. Il y a aussi un pêcheur qui fait la navette entre les îles avoisinantes, puis le docteur…"

Pourtant, Monique Duceppe ne semble pas vouloir tomber dans l’archétype. "Cette île était la seule île catholique dans le coin. On leur a proposé à ses habitants de fournir de la nourriture en échange d’une conversion. Ils n’ont pas accepté. Ils sont donc habités d’une fierté hors du commun, mais ils mangent tous les jours des patates et des petits pois. C’est cette vie-là que nous essayons de dépeindre." Une petite vie irlandaise qui nous fait étrangement penser à l’Île-aux-Coudres de Michel Brault. "Deux Irlandais peuvent se battrent et se tomber dans les bras en pleurant quelques minutes après. Alors cette pièce n’est pas une comédie où l’on se tape sur les cuisses, mais toutes les émotions y sont à fleur de peau. Le drame et la comédie cohabitent bien tant que la situation comique n’est pas gratuite. Dans cette pièce, c’est la naïveté des personnages qui provoque l’attendrissement."

Pour souligner l’écart, la metteure en scène a choisi un plateau tournant illustrant bien la vie routinière et autosuffisante des insulaires. "J’ai voulu recréer le lieu en suggérant plutôt qu’en reconstruisant dans les détails. Selon l’auteur Frank McCourt, il est facile de reconnaître un Irlandais car ses vêtements sont toujours mouillés. Je me suis servi de ça. La musique sera également celtique. Mais il n’est nullement question d’être folklorique, oubliez Riverdance…" Avec entre autres Normand Lévesque, Béatrice Picard, Pierrette Robitaille et Carl Poliquin.

Du 16 février au 26 mars
Au Théâtre Jean-Duceppe

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