Dossier Prométhée : Jouer avec le feu
Dossier Prométhée , ou la relecture chaotique d’un mythe fondateur.
À l’origine de Dossier Prométhée, la quatrième production du Centre international de recherche et d’action artistique et multimédia (CIRAAM), se trouvent des questions d’une brûlante actualité: l’hégémonie américaine, le rôle ambigu de l’ONU, le sacrifice des pays du quart-monde et le terrorisme. Ayant constaté de nombreuses correspondances entre ces préoccupations et le mythe de Prométhée – ce Titan qui vola le feu de Zeus pour en faire cadeau à l’humanité – Pascal Contamine offre une adaptation dont la confuse frénésie ne tarde pas à lasser.
Un espace bétonné accueille quatre barils de métal et un dispositif de torture aux parois de verre. Maryse Pressault-Chalifoux signe aussi des costumes et des maquillages à saveur punk. La représentation impose une anarchique rencontre entre le jeu masqué, la marionnette, la musique en direct, le chant, la danse, l’acrobatie, les arts martiaux et la vidéo. Bien qu’il soit impossible de reprocher au metteur en scène d’employer en vain les termes "métissage" et "multimédia", le résultat n’en demeure pas moins déconcertant. Forcés de composer avec cette hyperthéâtralité, les onze acteurs fraîchement diplômés ne s’en tirent pas trop mal. Sharon Ibgui, une des seules dont l’interprétation évite la caricature, impressionne tout particulièrement. En contrepartie, le jeu désincarné et la diction approximative de Pierre-Antoine Lasnier donnent bien peu de charisme au personnage principal.
Le texte, signé par Contamine sous le pseudonyme de Thomas Alexandre, procède à une féroce satire de la tyrannie contemporaine en employant librement le prisme du mythe. Amalgamant d’inquiétantes visions futuristes à des pans entiers d’antiquité, la partition multiplie les anachronismes et les mots d’esprit. Malheureusement, truffé de formules plus ou moins creuses, le discours des protagonistes entraîne l’humour noir du spectacle vers le didactisme et la morale. Bien qu’il aborde avec dérision les atrocités de la guerre, la perfidie des hommes politiques et la déroute télévisuelle, ce Dossier Prométhée ne parvient pas à éviter les pièges du théâtre à thèse, abandonnant ainsi le spectateur dans son sinueux sillage.
Jusqu’au 12 février
À Espace Libre
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