Guylaine Tremblay : Ainsi soit-il
La comédienne Guylaine Tremblay, qu’on a surtout vu au petit écran dans les dernières années, retourne à ses premières amours en interprétant quatre personnages au théâtre dans la pièce Bureaux, d’Alexis Martin.
Présentée une vingtaine de fois en 2003 à l’Espace libre de Montréal, la dernière pièce d’Alexis Martin avait connu beaucoup de succès lors de sa création. L’équipe a dû se retrouver pour se remettre dans le bain de cette comédie spirituelle et anarchique qui se déroule dans ces pièces mystérieuses et intrigantes que sont les bureaux. "C’est angoissant parce que ça fait longtemps qu’on ne l’a pas jouée, mais c’est surprenant comme les choses s’inscrivent dans le corps, on ne s’en rend pas compte, et ça revient vite! Comme le patin, finalement!" s’étonne une Guylaine Tremblay visiblement radieuse au bout du fil. C’est que la comédienne retrouve dans cette équipe des complices de longue date, en commençant avec Alexis Martin qui lui a offert rien de moins que quatre personnages. "Pour une comédienne, c’est extrêmement réjouissant de retomber dans des rôles de composition où l’on a à se changer beaucoup, dans l’allure physique, dans la voix. C’est comme un grand ménage d’actrice. Ça fait du bien, ça dérouille la machine", s’exclame la comédienne qui a surtout travaillé à la télévision dans les dernières années, notamment dans son rôle incontournable d’Annie dans Annie et ses hommes, qui lui a valu le prix d’Interprète féminine aux derniers Gémeaux.
Dans Bureaux, Alexis Martin revisite un thème récurrent dans ses œuvres: la place de la religion et de Dieu dans nos civilisations modernes. L’équipe est complétée par les comédiens François Papineau, Jacques L’Heureux, Julie Le Breton, Patrick Drolet et Stéphane Brulotte, qui incarneront [avec Alexis et Guylaine] 19 personnages au cours de la pièce. À la manière de sketchs entrecroisés et recoupés, on passe d’un bureau de curé à celui d’un concierge de centre commercial, d’un rabbin, d’un évêque, d’un médecin indien et d’une psychiatre, tous hôtes d’événements étranges. Alexis Martin se penche aussi sur les thèmes de la mort, de la maladie, du rôle de père dans la famille et dans la société et du choix d’avoir des enfants ou pas.
"Alexis se pose beaucoup de questions sur le bien et le mal… Jusqu’à il y a 40 ans, c’était la religion qui nous dictait de façon très précise comment en juger. Maintenant, c’est comme si chacun avait sa propre échelle des valeurs, on n’a pas vraiment de modèle. Les gens ne croient plus et s’accrochent à la psychiatrie ou à la médecine pour se guider dans la vie. On est une génération avec absence de guide, donc forcément, ça crée un vide et on a besoin de croire, c’est le propre de l’homme, je crois, examine-t-elle. En même temps, je trouve que c’est une période exaltante, on est insécure parce qu’on a à redéfinir des rôles mais on est aussi le boss de tout ça. Au bout du compte, on est quand même libre."
SAINTE GUYLAINE
Les quatre personnages interprétés par la fougueuse comédienne sont foncièrement différents: la colorée Mme Giguère, ménagère du curé qui voue un culte douteux au concierge des Galeries d’Anjou; le docteur Jimenez, psychiatre obscur qui fait des recherches sur le cerveau humain; la mère du curé qui n’accepte pas le choix de vie de son fils; et finalement Cabral, une policière portugaise insensible. "Juste les nommer, je suis fatiguée!" rigole Guylaine qui avoue qu’elle n’a pu faire autrement dans cet exercice que de se questionner sur sa propre relation avec la foi. "La question est loin d’être réglée! Je sais qu’en ce moment, je me considère davantage comme une humaniste, je crois à la vie, à l’être humain et en tout ce qui l’entoure. Cela dit, je ne dis pas non à une vie spirituelle. En fait, je suis en perpétuel questionnement là-dessus et ça évolue tout au cours de la vie, ça!"
La pièce est produite par le Groupement forestier du théâtre dont elle est cofondatrice avec Alexis Martin et quelques autres comédiens. "Au départ, c’était pour la création Matroni et moi qu’on l’a fondé, on a fait quelques projets et on s’est un peu dispersés par la suite. C’est une entité qui va toujours exister et qui nous permet de faire ce qu’on aime avec des gens qu’on aime, explique-t-elle. Je suis une comédienne totalement dénuée d’ambition professionnelle, j’ai toujours fait mes choix en fonction de mes coups de cœur et non selon où ça allait me mener", constate Guylaine qui avoue avoir accepté l’offre d’Alexis Martin avant même d’avoir lu la pièce. "Alex [Martin] est extraordinaire. Je l’aime comme être humain mais je l’admire aussi comme interprète, créateur et auteur. Il a une facilité à traiter de sujets importants en passant de scènes très drôles à d’autres plus touchantes. Et je me rends compte que dans mes choix professionnels, que ce soit dans Annie ou Bureaux, je me tiens dans ce registre, un mélange de drame et d’humour. J’adore voyager entre les deux!" conclut-elle.
Du 23 au 26 février à 20 h
Au Studio du CNA
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