Maxime Denommée : Sainte Trinité
Scène

Maxime Denommée : Sainte Trinité

Avec Tête première, Maxime Denommée endosse le rôle de metteur en scène.

Au printemps 2002, le Théâtre de La Manufacture faisait entendre, pour la première fois à Montréal et en français, la voix rude et poétique de Mark O’Rowe, un talentueux dramaturge irlandais dans la trentaine. Entre les murs de La Licorne, Fernand Rainville dirigeait avec succès Howie le Rookie, une œuvre dépeignant avec une grande inventivité narrative la découverte de l’amitié et de la fraternité par deux jeunes durs à cuire. Poursuivant ses fructueuses incursions dans la dramaturgie irlandaise contemporaine, la Manufacture propose ces jours-ci Tête première, la plus récente pièce de Mark O’Rowe, dans une mise en scène de Maxime Denommée.

Révélé en 1999 dans Trick or Treat de Jean Marc Dalpé, Maxime Denommée ne cesse depuis d’enchaîner les rôles marquants. Les performances qu’il a livrées dans L’Hôtel des horizons, Le Monument, Howie le Rookie et le fameux Cheech ont frappé l’imaginaire de nombreux spectateurs. À 29 ans, le comédien signe une toute première mise en scène. Si l’aventure comporte indéniablement une part d’audace, il n’en demeure pas moins qu’elle s’accomplit en territoire connu. En effet, ayant défendu près d’une centaine de fois le personnage de Rookie Lee (le rôle lui a d’ailleurs valu le Masque de la meilleure interprétation masculine en 2003), Denommée possède une intime compréhension de l’univers de Mark O’Rowe. De plus, mettre en scène Tête première permet au créateur de confirmer son attachement envers la Manufacture. "Ici, je suis comme chez nous, affirme-t-il. Depuis ma sortie du Conservatoire, j’y ai joué chaque année. C’est un lieu de création où il n’y a ni pression ni faux-semblant. La Licorne est l’un des rares théâtres à Montréal où il est possible de faire une vraie rencontre, où tous les spectateurs voient les yeux des acteurs." Il faut d’ailleurs attribuer à Jean-Denis Leduc, directeur de la compagnie, la bonne idée d’avoir offert la création de Tête première à Denommée. "J’ai dit oui dès que j’ai su que c’était O’Rowe, avoue Denommée, avant même de savoir de quoi parlait la pièce. Quand Jean-Denis me racontait l’histoire, je voyais déjà Sandrine Bisson, Kathleen Fortin et Dominique Quesnel dans les rôles." Depuis un an ou deux, en salle de répétition, Denommée se découvrait des réflexes de metteur en scène. "J’avais des notes à donner, précise-t-il, des choses à dire. J’ai réalisé que j’avais l’œil et le pif d’un metteur en scène. Je me suis donc préparé comme si j’avais à jouer la pièce. Je l’ai lu plusieurs fois. J’ai trouvé le ton, le rythme, il fallait ensuite que je l’explique aux filles, que je le transmette. C’est très enrichissant d’avoir à verbaliser et à clarifier des choses que l’on fait instinctivement."

À TROIS VOIX

L’action de Tête première se déroule dans une petite ville imaginaire où un étranger et son chien vont changer à jamais la vie de trois femmes. Similaire à celle d’Howie le Rookie, la structure dramatique entremêle trois histoires, trois monologues dont les liens qui les unissent se dévoilent peu à peu. Admiratif devant la richesse de cette partition (de nouveau traduite par Olivier Choinière), Denommée semble même la considérer comme une référence ultime. "Je n’ai rien proposé qui ne soit dans le texte, affirme-t-il. Toutes les réponses s’y trouvent. Pour que l’histoire soit mise en avant, nous avons travaillé sur une économie de mouvements et d’émotions. Je me fie beaucoup à mon oreille. J’ai réalisé qu’il ne fallait pas mettre l’accent sur les mots, mais sur le rythme, la ponctuation et la respiration, cette espèce de vie qui se trouve sous les mots."

"La magie de ce théâtre à la fois cru et poétique, c’est sa construction, affirme Denommée. Les images naissent des mots, de leur pouvoir d’évocation. Le récit permet des aller-retour entre des états émotifs présents et passés, il autorise une multitude de niveaux de jeu. Le procédé oblige le spectateur à travailler fort, à faire des liens, à exercer son imaginaire." Les similitudes formelles ont beau être nombreuses entre Howie le Rookie et Tête première, il semble que les thèmes abordés ne soient plus tout à fait les mêmes. "Mark O’Rowe a eu un bébé depuis l’écriture d’Howie le Rookie, nous apprend le metteur en scène. Ça se sent dans la pièce. Des histoires de gars et de bar on est passé aux relations de couple et à la maternité." Voilà bien des réalités que Maxime Denommée, père lui-même depuis peu, devrait savoir traduire à la scène.

Du 1er mars au 9 avril
Au Théâtre La Licorne

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