Serge Mandeville : Lune de fiel
Scène

Serge Mandeville : Lune de fiel

L’auteur et comédien Serge Mandeville déconstruit le temps et nous invite à en explorer les revers dans Autour du complexe: histoires d’éclipse.

La vie joue-t-elle aux dés? Créée à partir de trois courtes pièces, l’odyssée que nous prépare Serge Mandeville se base sur les aléas du destin. "Il s’agit d’un défi que m’a lancé Gilles Renaud, raconte l’auteur, visiblement heureux de s’être prêté à l’exercice. Je devais construire une seule et même histoire à partir de mes courtes pièces. J’ai donc cherché où mes intrigues pouvaient se rejoindre."

C’est le Complexe Desjardins qu’aura choisi Mandeville pour point de départ. "J’avais un personnage de suicidaire qui se jette du haut d’une des deux tours du Complexe Desjardins, un intégriste du théâtre qui décide, pendant le Festival Juste pour rire, de tuer le plus grand nombre d’humoristes en leur tombant dessus. J’ai donc eu l’idée de faire en sorte que cet événement interfère dans les autres histoires. Ainsi, une fille un peu perdue, boulevard René-Lévesque, reçoit le suicidaire sur la tête et meurt sur le coup. C’est à ce moment qu’un ange viendra la convaincre de remonter le temps afin de changer le cours de sa destinée. Il lui faudra trouver ce suicidaire et le convaincre de ne pas se jeter du haut de la tour."

C’est en suivant cette course contre la mort de la jeune fille que nous croiserons une galerie de personnages. "La fille s’imbriquera dans l’histoire de vengeance de deux frères de lait, dont l’un habite le penthouse du complexe. Il y a aussi le courtier immobilier qui se retrouve avec sa femme sur le même toit afin de regarder l’éclipse." Toutes ces histoires s’entremêleront donc pour nous conduire vers une confrontation finale au moment de l’éclipse solaire. "Les deux tours sont à 500 mètres l’une de l’autre. Le suicidaire et la jeune fille seront sur l’une, le vendeur et sa femme, sur l’autre. Et l’éclipse solaire aura lieu."

Mandeville, fasciné par le destin, ne cache pas son intérêt pour la théorie du chaos. "Je trouvais intéressant de montrer les conséquences d’un acte sur le déroulement d’autres histoires. La jeune fille, en intervenant dans la vie de chacun des protagonistes, perturbe un peu le cours de leur vie. Mais, est-ce que le résultat final est le même? Peut-on changer le destin? C’est ce que j’ai voulu interroger."

La structure d’un tel texte a demandé à l’auteur une logistique quasi graphique. "Puisque le suicide a lieu plusieurs fois, en fonction de l’histoire que l’on suit, j’ai eu besoin d’établir un horaire très précis pour établir la chronologie. Chaque scène devait se dérouler à une heure précise. Je savais que telle réplique se disait à 11h45 par exemple. Et je devais savoir ce qui se passait simultanément dans les autres histoires."

L’auteur, qui signe également la mise en scène de son texte, précise qu’il privilégie une sobriété esthétique. "C’est paradoxal mais la simplicité est souvent plus difficile à gérer, car il faut y trouver une justesse. Nous nous servons seulement de silhouettes en plexiglas et d’une bande son. C’est par l’éclairage que nous suggérerons l’éclipse." Un phénomène de la nature qu’utilise ici Mandeville pour faire culminer toutes les histoires. "Les scientifiques ont habituellement horreur de l’irrationnel, mais plusieurs ne peuvent nier que les éclipses créent chez l’humain une perturbation. C’est un événement naturel qui nous affecte depuis 200 000 ans et nos gènes s’en souviennent…"

Du 5 au 23 avril
À la Salle Jean-Claude Germain

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