Projet X : Prison humaine
Scène

Projet X : Prison humaine

Dans Projet X, Daniel Bélanger fait danser quatre comédiennes muettes qui ne craignent pas les rapprochements.

De tous les chorégraphes indépendants de Québec, Daniel Bélanger est sans doute celui qui fraye le plus près avec le monde du théâtre, notamment par sa collaboration avec Robert Lepage. Il était donc tout naturel pour lui de faire danser des comédiens. Pour Projet X, il a confié l’interprétation à quatre comédiennes de Québec: Érika Gagnon, Marie-Ginette Guay, Véronika Makdissi-Warren et Caroline Stephenson. "Ça a été une superbe expérience, très enrichissante, déclare-t-il. Je me trouve chanceux d’avoir pu travailler avec quatre comédiennes matures."

Créé en 2001 dans le cadre de la série Carte blanche au Périscope, Projet X n’avait été présenté qu’une seule fois. Heureusement, la Rotonde donne l’occasion à Daniel Bélanger de reprendre cette œuvre inspirée de la pièce de théâtre Transport de femmes, qui raconte le voyage à fond de cale de femmes déportées vers l’Australie.

C’est le public, disposé sur quatre faces, qui fait office de bateau. "Ça devient un lieu très clos, fermé comme un container (une allusion aux boat people), où elles sont obligées de vivre pendant six mois, dit le chorégraphe. Ce qui est intéressant, c’est que le spectateur est près des danseurs, ce qui fait qu’il reçoit beaucoup plus directement le travail des interprètes. Et puis j’ai misé d’abord et avant tout sur l’émotion. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai voulu travailler avec des comédiennes, je voulais que le mouvement émane de l’émotion."

Pendant le travail en studio, il est resté assis et a expliqué verbalement aux comédiennes ce qu’il voulait évoquer. "Elles devaient me retourner ça en mouvements et non en paroles, raconte-t-il. Je ne voulais pas qu’elles essaient de faire comme moi."

Les quatre femmes ont particulièrement aimé explorer le rapport du corps avec l’espace et le rythme. Plusieurs autres aspects du travail en danse étaient inusités pour elles: calculer et préciser chaque geste, justifier parfaitement le sens des mouvements, danser corps à corps avec une autre personne, bouger à l’unisson et surtout… faire passer le message sans leur voix, puisqu’elles ne prononcent aucune parole dans Projet X!

Partis de l’histoire et des personnages de Transport de femmes, le chorégraphe et ses interprètes ont rapidement pris leurs distances par rapport à la pièce, mélangeant plusieurs personnages. Mais le contexte demeure reconnaissable. La trame sonore, par exemple, est principalement constituée du son des vagues sur la coque.

Malgré le côté dramatique du sujet, Daniel Bélanger souligne que Projet X comporte de très beaux moments. "Je pense qu’étant donné la nature humaine, quand on se retrouve dans une situation précaire, c’est sûr qu’il y a des moments où on démarque son territoire. Mais il y en a d’autres où il y a une lumière, un espoir, un partage. On s’abandonne aux autres dans des situations comme celle-là."

Du 12 au 14 mai à 20 h
À la Salle Multi