Conquérant : La saga d'un spectacle
Scène

Conquérant : La saga d’un spectacle

Le spectacle équestre Conquérant, nouveauté au Site de la Nouvelle-France, est le résultat des rêves, de la détermination et, par-dessus tout, de la passion d’une équipe de créateurs visionnaires et fonceurs. Rencontre avec des gens de cœur.

Leur passion, à tous, est contagieuse. On les écoute en se demandant pourquoi on n’a pas encore tout lâcher pour faire le même métier qu’eux! Conquérant, la saga d’une race raconte l’histoire du cheval canadien sur notre continent, mais c’est d’abord et avant tout l’aventure de gens d’action qui donnent raison au vieil adage: "Quand on veut, on peut."

AU PAS

Au commencement, il y avait un site qui cherchait à diversifier son offre. L’an dernier, une écurie et un manège extérieur ont été construits pour accueillir une dizaine de chevaux canadiens, choisis soigneusement, voire amoureusement, par Daniel Bédard et Charles-Étienne Ménard. Pendant l’été, devant public, et ensuite tout au cours de l’automne et durant les longs mois d’hiver, les cavaliers ont entraîné leurs chevaux. Faire la révérence, s’allonger, mais surtout, s’habituer à leurs compagnons humains, répondre à leur gestuelle. Mutuellement, chevaux et humains ont appris à se faire confiance quoi qu’il advienne. "Je travaille avec la nature du cheval. Je ne le force jamais. Même si je le voulais, je ne pourrais pas contrôler son corps! Alors je dois travailler avec son cœur et son esprit", raconte Charles-Étienne, qui signe entre autres dans le spectacle un numéro fascinant dans lequel son cheval, en totale liberté, semble en télépathie avec son maître.

Puis, l’idée de monter un spectacle équestre s’est faite de plus en plus insistante. "Pour cadrer avec la mission historique du Site de la Nouvelle-France, l’idée maîtresse était de raconter l’histoire du cheval canadien en le mettant pleinement en valeur", explique Daniel Bédard, le maître équestre qui agit en tant que coach, en quelque sorte, de son équipe de cavaliers. "On a souvent vu le cheval canadien uniquement comme un bon travailleur, mais il est capable de beaucoup plus. On le comprend bien dans le spectacle", continue-t-il. Bref, "on savait ce que les chevaux étaient capables de faire, mais on ne savait pas comment mettre tout ça en place. On avait quelques idées de départ, une sorte de canevas, mais ça prenait beaucoup plus de chair pour faire un spectacle qui se tienne", enchaîne Charles-Étienne. Anne-Lise Minier, énergique responsable du développement du Site, planche donc intensivement sur un scénario en bonne et due forme.

AU TROT

Photo: Steven Ferlatte

"Oui, j’ai finalement pris en main le scénario, poursuit Anne-Lise. Je me suis inspirée d’écrits historiques dont certains sont reproduits intégralement, un passage du journal de Jean Doublet entre autres. J’ai ensuite envoyé le tout à Jacques Lacoursière, qui est un peu le parrain du Site, pour qu’il valide tout ce qui touche l’aspect historique." Avec ce scénario en main, Guy Pedneau, du Studio Le Terroir, a finalement dit oui.

"Je déteste ne pas savoir où je m’en vais", avoue facilement celui qui a réalisé la bande sonore, "l’esprit de Conquérant", affirment en chœur les autres membres de l’équipe. "C’est certain qu’au début, je n’avais pas assez de matériel sur quoi travailler, et trop peu de temps. Mais Anne-Lise est rapidement revenue avec quelque chose de plus concret et j’ai accepté d’embarquer dans l’aventure." C’était en janvier dernier. Le compte à rebours était commencé.

AU GALOP

Une des grandes particularités du spectacle, c’est le fait qu’il se déroule au son d’une bande déjà enregistrée, ce qui ajoute un défi supplémentaire. Tous les spectacles équestres sont habituellement présentés, paraît-il, appuyés par un orchestre en direct, dirigé par un chef qui peut faire reprendre les passages à ses musiciens, mine de rien, lorsque les chevaux manquent un mouvement, par exemple. Ici, le cheval doit suivre, sinon tant pis!

Rencontré dans sa tanière, d’où il mijote ses nombreux projets, Guy Pedneau est aussi volubile que ses collègues, aussi passionné, aussi passionnant. Certainement, c’est un perfectionniste. "La musique est un véhicule d’émotion très très puissant. Mais il faut travailler jusqu’à atteindre le point où on sent que la magie opère, jusqu’à ce qu’on soit soi-même convaincu. C’est la différence entre un bon show et un show captivant. Entre les deux, il y a des heures et des heures de travail et des quantités phénoménales de versions."

Entre les deux, il y a aussi une direction artistique sans compromis, et le choix de travailler avec les meilleurs: David Ellis au violoncelle, Yves Sergerie à l’harmonica, la voix sensuelle de Claudine Bourdages, enregistrée à partir du Japon, en sont quelques exemples. "J’aurais pu enregistrer les instruments moi-même, avec mon ordinateur. J’ai même eu un orchestre à cordes pour Noël! Ça faisait très bien le travail. C’était presque ça… mais non. J’ai fait appel aux pros!"

Encore une fois, c’est une question de cœur, de respect et de confiance. On ajuste les chorégraphies à la musique, on ajuste la musique aux besoins particuliers des mouvements des chevaux, on voit si l’émotion est au rendez-vous: le bon numéro avec la bonne musique. Et ça y est.

"C’est pas banal, on a demandé à Guy de créer quelque chose à partir de nos émotions, presque!" s’enthousiasme Charles-Étienne.

Le temps presse, la touche finale, la conception vidéo, est ajoutée par Daniel Charlebois de Motus Productions à la toute fin du processus. "Ça a été un contrat éclair, je n’ai fait que ça pour arriver à temps!" Sur grand écran, en haut de l’action, défilent des images qui viennent appuyer à la fois la trame sonore et les prouesses des chevaux. "Mon travail consiste à tisser un lien entre les éléments du spectacle, à créer un dynamisme. Les images viennent appuyer et lier les moments forts, les moments doux. En même temps, ça ne doit pas prendre trop de place, il ne faut pas que les gens soient captivés par l’écran, il faut qu’ils regardent les chevaux!" Dessins d’archives, jeux de superposition de photos, animation 3D: la vidéo a été conçue exprès pour les besoins spécifiques de ce spectacle. "Je savais aussi que ça s’adressait à un public familial, donc à beaucoup d’enfants. J’ai fait attention à ça dans mes choix", remarque le concepteur.

PARADE

Photo: Steven Ferlatte

D’aventures en péripéties, le spectacle prend forme. D’une idée un peu folle, il devient réalité. Tous en sont immensément fiers, avec raison. "Ce qu’il faut souligner, c’est que c’est un spectacle réalisé par des Québécois, uniquement avec des chevaux canadiens! C’est une fierté de plus. On ne rencontre ça nulle part ailleurs", précise le maître équestre. "On est partis de rien, avec peu de moyens, humains et financiers, renchérit la scénariste, et on y est arrivés. On n’est pas restés dans les "On devrait faire ceci, on devrait faire cela." C’est maintenant du concret!"

D’une durée d’une petite heure, Conquérant, la saga d’une race est un spectacle familial qui vient s’intégrer en complémentarité à la visite du Site de la Nouvelle-France. "On a un autre regard sur le Site après avoir vu le spectacle, c’est ça qui est tripant", note Daniel Charlebois.

"J’ai vu des tonnes et des tonnes de spectacles équestres, termine Daniel Bédard, mais pas un ne s’appuie sur une histoire. Ce ne sont que des enchaînements de numéros sur de la musique. La trame historique ajoute vraiment à l’émotion. On s’attache à Conquérant. Même pour les cavaliers, c’est plus motivant. Le plus beau commentaire que j’ai eu, c’est celui d’un petit garçon qui est venu me voir les yeux brillants en me disant qu’il avait appris plein de choses. C’est ça, le but, ça veut dire qu’on a réussi!"

À 11 h, presque tous les jours cet été
Au Site de la Nouvelle-France

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