Jean-Guy Legault : Morceaux choisis
Jean-Guy Legault signe l’adaptation et la mise en scène de Tout Shakespeare pour les nuls, une ambitieuse et excentrique traversée du répertoire shakespearien.
Au cours des prochains mois, l’œuvre de William Shakespeare rayonnera sur toutes les tribunes. En ce moment même, dans le cadre du Fringe, Keir Cutler défend Fou de Shakespeare, une satire dont la version anglaise est déjà bardée de prix. Cet automne, Yves Desgagnés entreprend le tournage d’une adaptation contemporaine de Roméo et Juliette, Lewis Furey transforme Antoine et Cléopâtre en un ambitieux théâtre musical (TNM) et Jean Asselin approche le terrible destin de Titus Andronicus (Omnibus). Bien plus téméraire que ceux-là, Jean-Guy Legault se mesure ces jours-ci à l’œuvre entière du grand Will en dirigeant Tout Shakespeare pour les nuls.
Presque quatre siècles après la mort de Shakespeare, ses pièces suscitent toujours l’engouement des metteurs en scène et des acteurs de la planète. Qu’ils aspirent à la plus fidèle reconstitution historique ou à la plus iconoclaste des relectures, toutes les espèces de créateurs trouvent leur compte dans le vaste et inspirant creuset que constitue le répertoire shakespearien. D’ailleurs, chez les Anglo-Saxons, il s’avère plutôt malaisé de tourner le dos, ne serait-ce que momentanément, au grand Will. Dans les années 90, cette relation amour-haine a même poussé Adam Long, Daniel Singer et Jess Winfield, de jeunes acteurs américains, à écrire et à jouer The Complete Works of Willm. Shkspr. (abridged), une œuvre dont l’irrévérence a suscité bien des remous. En quelque 90 minutes, les trois protagonistes de ce spectacle libre et baroque cherchent à "résumer" l’intrigue des 37 pièces attribuées au dramaturge élisabéthain.
Membre fondateur du Théâtre des Ventrebleus, Jean-Guy Legault a déjà plusieurs succès à son actif. Du Capitaine Horribifabulo à L’Honnête Fille en passant par Les Jumeaux vénitiens, les réalisations de l’acteur, auteur et metteur en scène offrent une vision renouvelée de la commedia dell’arte, une énergie festive dont l’unicité parvient à réjouir de larges auditoires. On imagine bien pourquoi Pierre Bernard, directeur artistique du volet théâtre du Festival Juste pour rire, a fait appel à lui pour assurer la mise en scène de Tout Shakespeare pour les nuls. "Ce que j’aimais au départ, révèle Legault, c’est la liberté que ça permettait. Ensuite, j’ai réalisé que c’était un gros travail de monter en deux mois un spectacle qui avait été créé en 12 ans. La représentation est morcelée, elle tient plus de la performance que d’une réelle histoire. Il s’agit presque d’un cabaret, d’un show de variétés dans lequel trois comédiens ont la prétention de montrer à quel point Shakespeare est fondamental à l’existence de l’homme. C’est une conférence qui dérape, qui devient complètement ridicule et clownesque."
Trouvant la traduction hexagonale moins drôle que la partition originale, trop éloignée de l’esprit Monty Python qui caractérise le texte anglais, Legault décide de réaliser lui-même l’adaptation. Le travail était majeur, surtout en ce qui concerne le caractère intrinsèquement américain de l’œuvre. "Les nombreuses références à l’actualité ou à la culture américaine appelaient des équivalences québécoises, précise Legault. D’autre part, comme le contact avec le public n’est pas le même ici qu’aux États-Unis, il a fallu apporter des modifications pour s’assurer d’aller chercher le spectateur québécois le plus rapidement possible." Pour relever un défi qu’il qualifie lui-même d’insensé, Jean-Guy Legault s’est entouré d’acteurs virtuoses: Simon Boudreault et Éloi Cousineau, de vieux complices, et Jean-Michel Anctil, un humoriste expérimenté dont ce seront les débuts au théâtre.
À partir du 22 juin
Au Théâtre National
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