Un mariage pas comme les autres : Sainte famille
Scène

Un mariage pas comme les autres : Sainte famille

La comédie Un mariage pas comme les autres de Tony Calabretta, mise en scène par Manon Lussier au Théâtre de Rougemont, donne l’occasion de s’émerveiller devant la comédienne Janine Sutto, qui y célèbre son 65e anniversaire de carrière.

Le théâtre d’été, on le sait, n’use pas souvent de finesse. Le bébé dans le placard ou encore l’amant égarant ses pantalons aura habitué le public à la facétie soulignée. Les rires fusent maintenant avant même les bons coups. Un mariage pas comme les autres n’échappe pas à cette règle. La salle croule devant les envolées parfois burlesques, mais célèbre surtout avec joie la comédienne Janine Sutto.

C’est que l’octogénaire fête ses 65 ans de carrière. La fée marraine du théâtre québécois (n’est-elle pas de toutes les premières, même les plus obscures?) irradie et charme encore une fois. On la retrouve ici dans le rôle de la nonna, espiègle grand-mère d’une famille italienne stéréotypée. La mère envahissante et protectrice (Sophie Clément) cherche à marier son fils célibataire (Jean-François Boudreau) tout en gardant la mainmise sur les fréquentations de son benjamin, macho et volage (Gabriel Sabourin). Le mariage de la jeune sœur (Isabelle Drainville), coiffeuse de profession, sert de toile de fond aux péripéties familiales.

Malheureusement, malgré les petits bonheurs générés par les brèves mais non moins jouissives apparitions de la nonna, la pièce semble reposer sur une suite de "scènettes" qui ne privilégie pas la cohérence générale. Plusieurs histoires s’y entremêlent, rendant les personnages confus. Le plus jeune fils parle de ses tribulations d’acteur et d’amant, la sœur hystérique passe de la paranoïa à la boulimie, la mamma s’égare entre le ménage et la recherche d’une femme pour son fils tandis que celui-ci s’attriste d’une situation qu’il semble pourtant entretenir. Les personnages secondaires tels l’agent de casting benêt (vif Patrice Dubois) et la nymphomane (Jennie-Anne Walker) sont tout aussi improbables et ne contribuent qu’à brouiller encore davantage une trame narrative inégale.

Bref, il en résulte un brouhaha général que la mise en scène de Manon Lussier ne parvient pas à dominer. Si la metteure en scène reste reconnue à juste titre pour ses fougueux numéros chorégraphiés, elle ne parvient ici qu’à souligner le morcellement du texte. La cautérisation d’une ampoule prend ici des airs de performance tout en demeurant inutile. Les acteurs, usant tous d’un style différent, ne semblent pas jouer dans la même pièce. On se demande alors si l’absence de profondeur de l’auteur a contaminé la directrice d’acteurs ou si celle-ci s’est étrangement gardée d’enrichir le propos. Le résultat n’en demeure pas moins le même et relance la question des exigences de qualité du milieu théâtral (et du public) à l’égard du théâtre estival.

Jusqu’au 27 août
Au Théâtre de Rougemont