Jean-Guy Moreau : Sans fard et sans reproche
Scène

Jean-Guy Moreau : Sans fard et sans reproche

Jean-Guy Moreau est de retour en force avec son tout nouveau spectacle présenté à l’Anglicane. Intimes et lucides, ces retrouvailles s’annoncent délicieusement pertinentes!

Joint par téléphone pour parler de son prochain spectacle, Jean-Guy Moreau comme personne, la première question à l’imitateur s’imposait d’elle-même. Pourquoi proposer un nouveau spectacle alors que l’humour est devenu l’apanage de ceux qui parlent vite, vite, vite, ou qui pensent faire de l’absurde en faisant n’importe quoi (une petite relecture de Jarry, Beckett ou Camus s’impose: l’absurde, ce n’est surtout pas n’importe quoi!)? "Je reviens justement parce que l’humour n’est pas mort, s’exclame Jean-Guy Moreau au bout du fil. L’humour, c’est comme la peinture, l’offre doit être illimitée. Les matériaux de base sont les mêmes, pigments, canevas, pinceaux, mais les résultantes sont innombrables. Il en faut de tous les styles. C’est une question d’équilibre." Moreau, lui, préfère l’humour intelligent, celui qui est réfléchi et qui fait réfléchir.

Solidement ancré dans sa formation aux Beaux-Arts comme céramiste, Jean-Guy Moreau a pratiquement touché tous les métiers de la scène. Tantôt chanteur, tantôt comédien, il est surtout connu pour ses imitations. "Quand j’imite, c’est littéralement un costume vocal que je revêts. Comme pour les costumes et les masques de la comedia dell’arte, j’établis une convention. C’est toujours moi qui parle, mais je le fais par la voix d’une personnalité publique. Ça me permet de situer immédiatement les spectateurs dans un contexte. C’est un déclic, un lieu commun avec le public qui me permet de livrer mes réflexions." Ce spectacle promet une galerie de nouveaux personnages lui permettant d’aborder les thèmes politiques et sociaux qui lui sont chers.

Après 40 ans d’un métier si près des grandes mutations de notre société, l’artiste ne peut éviter de prendre du recul pour analyser notre monde. Pour l’occasion, il invitera des personnages qui ont fait sa renommée, notamment Lévesque et Drapeau. "Comme tout le monde, j’ai vu de nombreux bouleversements sociaux depuis 40 ans, des périodes de foisonnement d’idées, d’autres d’apathie généralisée. Ce qui me trouble le plus, quand je compare mes anciens personnages politiques à ceux d’aujourd’hui, c’est que les législateurs sont maintenant gouvernés par des maisons de sondages et des firmes de relations publiques. Le sens du risque et du projet politique a complètement disparu." Moreau n’est pas cynique ou nostalgique pour autant: "J’ai l’impression que, maintenant plus que jamais, ce sont les artistes et les créateurs qui jouent le rôle de moteurs de nos sociétés."

Grande nouveauté pour ce spectacle, Jean-Guy Moreau se dévoile un peu plus en parsemant sa performance de chansons originales. Cette fois, pas de costume vocal, seulement la voix de Moreau et la musique de Daniel Mercure. "J’ai toujours aimé chanter, et ce, depuis les débuts de ma carrière dans les boîtes à chansons. Ensuite, j’ai fait chanter mes personnages pour leur donner une autre dimension. C’étaient mes mots, mais avec la voix des autres. Cette fois-ci, je me présente comme personne, sans imitation… D’où le titre du spectacle." D’ailleurs, l’expérience plaît tellement à Moreau que des projets d’enregistrement d’album sont dans l’air pour l’automne. À suivre!

Au terme d’un entretien téléphonique riche en constats et en idées, la réponse à la première question de l’entrevue est apparue limpide: l’artiste propose un nouveau spectacle parce que notre petit monde glisse et que ne rien dire serait honteux… Moreau est de retour, grand bien nous en fasse!

Les 22 et 29 juillet et le 5 août à 20 h
À l’Anglicane
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