J'aime beaucoup ce que vous faites : Faux semblants
Scène

J’aime beaucoup ce que vous faites : Faux semblants

Avec J’aime beaucoup ce que vous faites, mise en scène par Véronique Côté, le Théâtre Voix d’accès offre une comédie au texte et au jeu solides. Étonnement et rire garantis.

Carole et Charles vivent à la campagne; ils attendent leurs meilleurs amis, Marie et Pierre, en route pour passer la fin de semaine avec eux. À cause d’une fausse manœuvre sur le téléphone cellulaire de Pierre, Carole et Charles apprennent ce que leurs "amis" pensent réellement d’eux. À leur arrivée, le couple joue d’abord le jeu, accueillant les invités tout en sourires. Entre allusions, blagues un peu dures et vérités finalement crachées avec colère, la rencontre amicale se transformera vite en règlement de comptes un peu féroce.

L’action prend place dans un décor (Érika Schmitz) exploitant les deux étages du théâtre et offrant, par un procédé intéressant, la vue, par une large fenêtre, sur des arbres en mouvement: on s’y croirait. Sur le plateau, cuisine, salle à manger et salon chaleureux, où Carole, dans une scène d’ouverture très drôle, essaie un désordre savamment planifié pour épater ses amis. Ajout ingénieux: le haut d’un mur à moitié construit, dont on voit l’intérieur et l’isolant. La maison est en rénovation; ce qui s’y déroule révèle les dessous d’une prétendue amitié.

L’idée exploitée par l’auteure Carole Greep a de quoi plaire: la découverte, par un concours de circonstances, de l’hypocrisie de gens qu’on prenait pour ses meilleurs amis. Les situations sont bien imaginées, le texte est dense, efficace. Le procédé à la base de la pièce, de plus, est brillant: nous révélant dès le début la pensée de Marie et Pierre, il nous permet de savourer, par la suite, toute leur fausseté, et les décalages, plus ou moins subtils, entre réalité et apparences dans les propos que tiennent les deux couples d’amis.

Les comédiens, enjoués, mènent avec aplomb ce bal des révélations. Jeu réaliste pour Carole et Charles (Marie-Frédérique Auger, Nicolas Létourneau), couple simple et sincère, interprétation juste assez caricaturale pour Marie et Pierre (Catherine Larochelle, Emmanuel Bédard), couple BCBG, superficiel, pour qui ne comptent que les apparences. Dans le rôle de la jolie gourde, poupée au cerveau un peu lent, mais non dépourvue de sensibilité, Catherine Larochelle est excellente, crédible, très drôle et même, touchante. Si, lors de la Première, le début de la pièce semblait un peu surjoué, et parfois maladroit, l’ensemble prit rapidement, ce soir-là, un rythme très fluide.

Principale réserve, déjà émise au sujet d’une autre production du même groupe: l’accent français qu’adoptent les comédiens parce que la pièce est française. Pourquoi faire ce contre quoi des générations de comédiens québécois ont dû se battre, obligés qu’ils étaient jusqu’au milieu du XXe siècle à prendre l’accent français sur scène? Dans J’aime beaucoup ce que vous faites, rien ne le justifie: la pièce ne comporte aucun argot, et que de rares expressions très typées, qu’il suffirait d’adapter.

Cet élément, pour agaçant qu’il soit, n’entache en rien les qualités du spectacle. J’aime beaucoup ce que vous faites présente un divertissement intelligent, bien réalisé, plein d’énergie.

Jusqu’au 4 septembre, du mercredi au samedi à 20h
Au Théâtre Petit Champlain
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