Les Turlupinades : Gratin médiéval
Scène

Les Turlupinades : Gratin médiéval

Le Cercle coopératif d’art dramatique présente Les Turlupinades, un spectacle qui allie farces médiévales, musique et jonglerie. Rencontre avec le féru d’histoire qui est derrière ce projet.

Il y a longtemps que l’idée de cette production germe dans la tête de Normand Grégoire. C’est en bouquinant qu’il est tombé sur des farces médiévales rares et l’envie le prit aussitôt de les mettre en scène. Occupé ailleurs, le scénariste, réalisateur et metteur en scène a mis huit ans avant de créé le spectacle, d’abord avec des étudiants du Cégep de l’Outaouais, pour finalement le monter avec des professionnels en fondant, avec d’autres passionnés comme lui, le Cercle coopératif d’art dramatique.

Et c’est ainsi que naquirent Les Turlupinades, présentées au théâtre du Domaine Grande Évasion, ancienne Ferme Nuptiale, à Ripon. Quatre farces y sont présentées dans des traductions d’André Tissier. Il y a d’abord Le Pâté et la Tarte, dont l’intrigue tourne autour de deux coquins affamés, sans le sou, qui jouent un tour à un pâtissier avare et à sa femme, subtilisant à celui-ci un pâté d’anguille. Le Dit des perdrix met en scène un homme qui invite le curé à dîner après une chasse heureuse. Sa femme ne pourra s’empêcher de goûter au festin et elle en paiera le prix. Suivra Le Cuvier, farce plus connue où une femme et sa mère se liguent pour imposer au paresseux Jacquinot sa contribution aux tâches ménagères alors que celui-ci n’attend qu’une occasion pour retourner la situation en sa faveur. Finalement, Le Chaudronnier raconte l’histoire d’un couple qui fait pari du silence et de l’immobilité après une querelle – le perdant payant la tournée à l’autre. Le chaudronnier s’amusera de la situation. Les tableaux sont entrecoupés de numéros de jonglerie et de musique par les comédiens-jongleurs-musiciens Sylvie Gauthier et Jeff Hannah du groupe Oriflamme. "Ça outrepasse le théâtre, ça devient une fête, un carnaval sur scène", s’exclame le metteur en scène, enthousiaste. Sans compter que des brunchs et des soupers au menu traditionnel du Moyen Âge sont aussi offerts.

La distribution est quant à elle constituée de Sébastien Lajoie, Benoît Osborne, Marité Boily et Nadja David. Ces deux dernières ont d’ailleurs déjà travaillé avec Normand Grégoire dans une adaptation d’un conte d’Edgar Allan Poe, Cœur révélateur, qui a connu un franc succès à l’Auberge Symmes il y une dizaine d’années. Spectacle qu’il projette peut-être de remettre sur pied l’an prochain.

Sortant de son sac de cuir les œuvres littéraires ayant agrémenté sa recherche, le féru d’histoire remarque: "Ce qui m’a toujours frappé avec les farces médiévales, c’est de constater à quel point on n’a pas beaucoup fait de chemin depuis 500 ans. J’ai remarqué que les textes auraient pu être carrément adaptés au Québec aujourd’hui et ils auraient raconté la même affaire. Les problèmes sont les mêmes: les relations hommes-femmes toujours aussi tendues, les problèmes d’argent… Il fallait de l’argent pour trouver à manger, pour s’abriter, pour élever les enfants, pour faire les tâches ménagères. Et aujourd’hui, c’est ce qu’on fait toujours, on travaille 60 heures par semaine pour avoir à manger, une maison, pour élever des enfants…" ricane-t-il.

Rien n’a été laissé au hasard dans cette production: le décor est à peu de choses près la réplique d’un décor rudimentaire immortalisé sur une gravure de l’époque, les costumes ont été taillés à même d’authentiques patrons médiévaux, les accents ont été travaillés selon la région d’origine des textes, soit la Normandie et la Picardie… Bref, Normand Grégoire a mis toute l’énergie possible pour que le caractère médiéval soit fidèle à l’esprit de l’époque. Et surtout pour ne pas tomber dans les clichés qu’on rattache souvent à cette époque. "On voulait éviter les combats à l’épée, les tournois de chevaliers avec les reines et les rois… On ne voulait pas tomber dans la présentation habituelle. Les farces traitent de la vie quotidienne des gens, note Normand Grégoire. Au fond, elles jettent un regard sur la société médiévale, la vie des petites gens, des paysans, des ouvriers… qui s’amusent aux dépens des bourgeois. C’est en quelque sorte une critique sociale, même si c’est fort schématique", conclut-il.

Jusqu’au 27 août
Au théâtre du Domaine Grande Évasion
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