Le Théâtre La Licorne : L’enfance de l’art
Le Théâtre La Licorne ouvre sa saison avec la reprise en grande salle de la pièce Toutou Rien, une heure de bonheur présentée par la jeune compagnie Qui va là.
C’est la première bonne nouvelle de la rentrée. Le poétique Toutou Rien, débusqué dans la petite salle du Théâtre La Licorne en 2003, occupera la grande salle dès le 25 août. Avec une capacité extraordinaire à donner vie à l’inanimé, les trois concepteurs et interprètes ont enchanté les publics avec les tribulations de cet ours en peluche abandonné. Le spectacle, qui a connu depuis sa création en 2001 moult modifications, risque donc une fois de plus le renouvellement.
La salle principale se prête pourtant moins à l’univers baroque typique de Toutou Rien. "On sait qu’on ne peut avoir le même rapport avec le public dans une grande salle, spécifie Justin Laramée. La fluidité des transitions devait être retravaillée. Il fallait également trouver une unité tout en gardant la grande diversité de tons. Nous avons découvert que nous revenons toujours en bout de ligne aux choses simples. Nous faisons tellement le tour de chaque idée que le retour à la simplicité en est automatiquement chargé."
Tout le défi réside donc dans le fait de donner de l’ampleur à un spectacle composite dont la force principale est d’être né de rien. Pour Qui va là, pas question de transformer le principe fondamental du théâtre d’objet. "La magie n’est pas dans l’illusion, elle est dans le "faire croire", rappelle Félix Beaulieu-Duchesneau. Elle se situe dans l’imaginaire. Il faut donner au public le droit de croire que quelque chose vole, même s’il voit bien que c’est ma main qui la tient. C’est une magie pauvre qui pour nous reste extrêmement riche."
La vivacité créatrice du trio demeure remarquable, et le propos a de quoi ravir. Plutôt rare de voir trois garçons sur scène parler de tendresse. Surtout en ces temps difficiles pour l’image paternelle de leur génération. "Toutou Rien touche à beaucoup de choses dont l’humanisme, l’empathie, la perte de l’innocence, le deuil, poursuit Félix Beaulieu-Duchesneau. Le toutou reste seul dans un univers où le sacré n’existe plus. Si l’emblème de l’enfance est saccagé, qu’est-ce qui reste?"
Image provocante en effet que ce toutou éventré demandant au public de venir l’étreindre. "Ça crée automatiquement un malaise, affirme Justin Laramée. Mais la personne qui accepte de monter sur scène délivre tout le monde. Cette idée qu’une personne porte toutes les autres me plaît beaucoup. En fait, si on perd ça de vue, c’est là qu’on se sera perdus." Un mandat qui n’est pas sans rappeler celui du Teatro Sunil de Daniele Finzi Pasca.
Le cap semble maintenu puisque les trois jeunes comparses présenteront une nouvelle création dès février sur le thème des aînés. "Avec Qui va là, nous nous engageons face à un sujet que tout le monde connaît, conclut Philippe Racine. En espérant toujours que notre sensibilité va atteindre celle d’un public."
Du 25 août au 3 septembre
Au Théâtre La Licorne
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