Les Palmes de M. Schutz : Atomes crochus
En 15 ans, Les Palmes de M. Schutz n’ont pas pris une ride.
En 1989, à Paris, Gérard Caillaud obtient un immense succès avec Les Palmes de M. Schutz, une comédie de Jean-Noël Fenwick. Récipiendaire de quatre prix Molière, la production tient l’affiche du Théâtre des Mathurins jusqu’en 1995. En 1997, alors que les droits de la pièce ont été vendus dans plus d’une dizaine de pays, Claude Pinoteau la porte au grand écran. En 1991, en signant la mise en scène de cette même pièce, Denise Filiatrault amorce 15 ans de collaboration avec le Festival Juste pour rire. Recevant les éloges de la critique et du public, le spectacle connaît une centaine de représentations à travers le Québec. Enfin, 15 ans plus tard, la production-événement a repris l’affiche à Montréal cet été et s’arrête à la Salle Maurice-O’Bready le 3 septembre.
Chercheur timide, Pierre Curie se consacrerait paisiblement à ses recherches, en compagnie de son collègue Gustave Bémont, si le directeur de l’école, M. Schutz, soucieux de décrocher les fameuses palmes académiques, n’avait eu l’idée de leur adjoindre les services de Marie Sklodowska, une brillante étudiante polonaise. Après une période d’apprivoisement, Pierre et Marie vont faire ensemble de grandes découvertes: la radioactivité, le radium et… l’amour! Il faut avouer que c’est avec un plaisir intact que l’on retrouve cette irrésistible galerie de personnages "historiques". Évoluant dans un laboratoire minutieusement conçu par André Barbe (décor) et Claude Accolas (éclairages), vêtus des superbes costumes dessinés par Véronique Borboën, les acteurs défendent leurs rôles avec panache. Aussi convaincante lorsqu’elle adopte les attitudes de la novice, de la révolutionnaire ou de la femme fatale, Sylvie Drapeau s’avère tout entière engagée dans les combats de Marie – un emploi qui, bien qu’essentiellement comique, exploite de nombreuses facettes de son immense talent. À ses côtés, Germain Houde communique toute sa fougue à Schutz et Denis Roy incarne fort bien l’attachante maladresse de Curie. Alors que Patrice Coquereau donne du mordant à son Bémont et que Jean-Marie Moncelet parvient, lors de ses rares apparitions, à imposer le recteur de Clausat, Danièle Lorain offre certaines des plus hilarantes répliques de la soirée. Dans la peau de Georgette, une nourrice qui n’a pas la langue dans sa poche, elle est absolument parfaite!
Les Palmes de M. Schutz ont beau tirer profit des ressorts du vaudeville, elles soutiennent néanmoins un discours savant et lucide sur les enjeux de la science, la lutte des classes, la redéfinition des rôles sexuels et le surgissement des conflits entre les peuples. En plus de communiquer à la représentation son légendaire sens du rythme, Filiatrault parvient à épouser les différents registres de l’œuvre. Faisant apparaître avec beaucoup de finesse les phénomènes, aussi bien physiques que sociopolitiques, qui ont présidé à la naissance du XXe siècle, ce spectacle remporte le pari d’informer tout en divertissant, de s’adresser à l’intelligence tout en déclenchant le rire.
Le 3 septembre à 20 h
À la Salle Maurice-O’Bready