Scène

Denise Verville : Mère courage

Denise Verville fréquente, ces jours-ci, la grande famille des personnages de Michel Tremblay: elle incarne Albertine, dans En pièces détachées.

Quiconque a côtoyé l’œuvre de Tremblay a déjà rencontré Albertine. Un des personnages clefs des Chroniques du plateau Mont-Royal, elle apparaît régulièrement dans les pièces de l’auteur, aux prises, toujours, avec les mêmes problèmes: ses relations tendues avec sa fille Thérèse, ses rapports difficiles avec son fils Marcel, souvent égaré dans un monde qui lui est propre. Dans En pièces détachées, Albertine et Thérèse, une fois de plus, se querellent violemment; l’arrivée de Marcel, enfui de l’institution où on l’a placé, viendra clore leur journée de façon inattendue.

Denise Verville connaît bien l’univers de Michel Tremblay. Comme interprète ou metteure en scène, elle a exploré, notamment, Les Belles-sœurs, À toi pour toujours, ta Marie-Lou et Albertine en cinq temps, dans laquelle elle jouait le rôle d’Albertine à 60 ans. En pièces détachées nous montre "une Albertine un peu touchée dans sa chair, explique la comédienne. Elle n’est pas bien: elle fait beaucoup d’arthrite, elle est fatiguée, sa vie lui pèse. Elle dit: "Toute ma vie je me suis débattue, j’ai combattu, mais là, je suis plus capable d’endurer rien, ni personne. Bientôt ça va être fini, et quelqu’un d’autre va arranger ça." Et ça, on n’a pas ça dans les autres pièces".

Qu’on lise ou qu’on voie du Tremblay, on a toujours le sentiment d’évoluer en terrain familier, de retrouver des proches. Il en va de même, semble-t-il, lorsqu’on le joue. "Les pièces de Tremblay ont toujours une immense résonance humaine et québécoise. Ses histoires touchent des espèces d’archétypes: tout le monde, à des degrés divers, va se reconnaître là-dedans, va reconnaître une tante, une voisine… Ça a cette profondeur-là, cet écho extraordinaire. C’est une pièce dure, très impressionnante, qui présente une tranche de vie vraisemblable. Ça ne laisse pas indifférent, ce spectacle-là: Tremblay vient nous trouver, il vient nous chercher là où l’on est. Alors pour des comédiens, jouer Tremblay, c’est formidable: c’est un grand honneur."

Théâtre québécois ou international, théâtre de répertoire ou textes contemporains, Denise Verville a joué de tout, avec autant de plaisir: le théâtre est pour elle une grande passion. "C’est un grand cadeau de faire du théâtre. On approche des textes absolument magnifiques, et c’est génial embarquer dans ces textes, les dire, interpréter des personnages, se "colletailler" avec ce défi-là, cette peur-là. C’est plus que du plaisir: c’est une grande joie. C’est difficile à expliquer, mais tu crées une vie quand t’es au théâtre. Moi je dis que toutes ces vies-là que l’on crée, c’est toujours quelque chose de gagné sur la mort: c’est une vie en plus."

Sur scène, avec Denise Verville, les comédiens Frédérick Bouffard, Lorraine Côté, Valérie Laroche, Catherine Larochelle, Marie-Christine Lavallée, Ansie St-Martin, Guy Daniel Tremblay; en coulisses, le metteur en scène Frédéric Dubois, les concepteurs Michel Gauthier, Yasmina Giguère, Denis Guérette, Pascal Robitaille.

Du 20 septembre au 15 octobre
Au Théâtre de la Bordée
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