Marjorie Vaillancourt : Ces obscurs objets de désir
Scène

Marjorie Vaillancourt : Ces obscurs objets de désir

Marjorie Vaillancourt interprète le rôle-titre de Phèdre et autres labyrinthes, de la dramaturge mexicaine Ximena Escalente. Jeux de l’amour et du destin.

Après avoir vu la lecture de Phèdre et autres labyrinthes à Montréal il y a deux ans, Marjorie Vaillancourt a cherché à se procurer le texte. En vain. Ce n’est qu’au moment de produire un spectacle avec Martin Perreault, son associé du Théâtre de l’Inconnu, qu’elle a enfin réussi à mettre la main dessus. Signe du destin? C’en est à tout le moins le thème central. "Est-ce que notre chemin est déjà tout tracé ou est-ce que c’est nous qui le traçons? résume-t-elle à ce sujet. Moi, c’est ce qui m’avait attirée dans cette pièce. Je m’étais posé des questions en sortant de là." C’est donc cette interrogation qui sert de fil d’Ariane à Ximena Escalente, alors qu’elle nous guide au sein d’un dédale de situations, placées sous le signe des amours interdites et inspirées de la tragédie antique, où une femme se suicide afin d’échapper à son incontrôlable passion pour son beau-fils. "C’est une relecture moderne, observe-t-elle, mais elle a gardé beaucoup de personnages de la mythologie, qui apparaissent à Phèdre en rêve et qui lui indiquent ce qu’elle doit faire." De même, la dramaturge mexicaine ne se contente pas de transposer l’action au XXIe siècle, elle crée également de nouveaux protagonistes et présente l’héroïne à trois époques de sa vie: à 10 ans, où on la découvre en orpheline pleine de "caractère et très, très curieuse"; à 14 ans, tandis que, objet d’une malédiction encore imprécise, elle tombe amoureuse de Thésée, l’amant de sa sœur; à 35 ans, âge auquel elle s’éprend d’Hippolyte, le fils de ce dernier. "Elle va jusqu’à essayer de se prostituer pour oublier tout ça, mais elle est fatiguée de lutter et finit par abandonner son destin. Alors, on est allé vers la folie, le déchirement", explique-t-elle à propos de cette partie.

Composé d’une trentaine de segments brefs, que le metteur en scène Jonathan Gagnon a eu l’idée de situer dans un parc mexicain – où "des enfants jouent et, tranquillement, les personnages s’installent, l’histoire débute" -, le texte se présente également comme un labyrinthe pour les comédiens, qui doivent être capables d’exprimer rapidement toute une gamme d’états de cœur et d’esprit. "Ce sont de très courtes scènes et de très courtes phrases, note l’artiste. On a dû travailler beaucoup là-dessus. En fait, ça va tellement vite qu’à un moment donné, il a fallu que je m’assois et que je trace la carte de toutes les émotions que je passe." C’est d’ailleurs cette caractéristique qui fait, à son sens, la particularité de la pièce. "Ça apporte vraiment quelque chose de spécial, un rythme. L’histoire de Phèdre demeure tragique, mais c’est "écrit très léger", ça pourrait être dit au quotidien, à la télé. Les phrases sont très simples, très courtes, et on peut jouer plein d’émotions en-dessous de ça." Ainsi, même si leur premier réflexe a été d’aller vers une interprétation tragique, ils en sont finalement venus à privilégier plus de naturel. "On a beaucoup transformé notre travail pour que ce ne soit pas lourd ou plaintif", conclut-elle. Reste à voir ce que nous réserve le prochain tournant…

Jusqu’au 1er octobre
À Premier Acte
Voir calendrier Théâtre