Paule Baillargeon : Imposture au féminin
Scène

Paule Baillargeon : Imposture au féminin

La très polyvalente Paule Baillargeon ajoute une corde à son arc en endossant une première mise en scène au théâtre avec Portrait chinois d’une imposteure de Dominick Parenteau-Lebeuf.

La cinéaste, actrice et scénariste Paule Baillargeon (Le Petit Jean-Pierre, le Grand Perreault) n’était pas revenue au théâtre depuis des années, et voilà qu’une jeune dramaturge québécoise, Dominick Parenteau-Lebeuf (L’Autoroute), attire son attention bienveillante et la ramène à ses premières amours. C’est que Paule Baillargeon a fait ses premières armes avec le Grand Cirque ordinaire, troupe montréalaise fortement axée sur la création collective à caractère contestataire et égalitaire. "C’était une troupe fabuleuse où j’ai tout appris. On inventait tout, on faisait tout! Ça a duré plusieurs années puis après, entrer dans le théâtre traditionnel, ça me le disait moins, l’aventure avait été trop grande", note l’artiste multidisciplinaire.

En résidence au Théâtre français de Toronto (TfT), Dominick Parenteau-Lebeuf, qui avait déjà rencontré la réalisatrice lors d’une mise en lecture, propose que ce soit elle qui mette en scène sa récente pièce. Il semblerait que l’effet miroir ait opéré entre les deux femmes: "Dominick pourrait être ma fille si on parle de l’âge, mais en même temps, si on parle du métier ou de l’imaginaire, on se rejoint beaucoup. Je me reconnais énormément en elle et je crois qu’elle se reconnaît en moi aussi. Il y a une connivence dans les thèmes, dans les manières de voir les choses, dans la façon de mêler humour et gravité…"

Ce qui avait d’abord été une commande du directeur artistique du TfT, Guy Mignault pour un Don Quichotte moderne qui évolue dans la ville de Toronto s’est finalement soldé en une comédie noire fantaisiste. L’action commence alors qu’une auteure en pleine ascension est reçue au magazine culturel Portrait chinois, animé par une journaliste vedette névrosée qui usera de son expertise acérée pour cuisiner son invitée. Conviée pour présenter sa récente pièce intitulée Portrait chinois d’une imposteure (!), la jeune auteure, en proie à de vives "épilepsies", donnera vie au théâtre qui se joue dans sa tête, avec ses démons intérieurs, les trois sœurs Doris, Milli et Nice, autrement dit le perfectionnisme, l’angoisse et le doute. "Portrait chinois…, c’est comme un ovni, ça ne ressemble à rien", s’étonne encore la metteure en scène.

Ainsi, dans le texte, la dramaturge décortique "les bibittes" du créateur moyen. "Dans la lecture que j’en fais, je pense que c’est aussi le problème de Dominick de se sentir imposteure et de vouloir tellement tout dire."

Est-ce que ce fameux syndrome de l’imposteur a déjà habité la réalisatrice? "Ah, ça m’a pris toute ma vie! Mais pour cette expérience, je me suis assumée, j’ai fait confiance à mes flashs, j’ai emmené mes méthodes. Mon expérience cinématographique m’a servi sur le plan visuel. J’étais très présente au décor, aux costumes… L’utilisation de la musique est un peu imprégnée du cinéma aussi…"

Et dans cette production qui réunit sans conteste deux féministes endurcies à sa barre, la distribution se compose de cinq comédiennes – Mélanie Beauchamp, Lina Blais, Stéphanie Broschart, Geneviève Langlois et Patricia Marceau – et d’un seul comédien dans un petit rôle, Olivier L’Écuyer. "Je ne qualifierais pas cette pièce de féministe. C’est un problème d’artiste, pas de femme, mais c’est exprimé par une femme avec des femmes. Bon, c’est certainement très féminin, l’univers l’est… Notamment les trois poupées dans sa tête, on s’en est donné à cœur joie dans les costumes… Dans leurs réactions, avec leurs sacoches, leurs chapeaux, elles sont outrageusement féminines!"

Les 15, 16 et 17 septembre à 20 h
À la Nouvelle Scène
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