Herménégilde Chiasson : Ainsi soit-il
Herménégilde Chiasson, auteur et artiste visuel accompli, présente sa toute dernière pièce, Le Christ est apparu au Gun Club, qui met en question la spiritualité dans un mode incisif.
Grand poète et artiste visuel, le lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick, Herménégilde Chiasson, a couché sur papier ses préoccupations spirituelles dans sa récente pièce, créée au Théâtre L’Escaouette de Moncton. Morceaux choisis d’une rencontre avec ce grand poète des mots et de l’image.
Dans quel contexte avez-vous écrit cette pièce?
"Je voulais écrire à propos de la spiritualité. Je trouvais que c’était un sujet important, surtout à notre époque, parce que c’est assez controversé, non seulement en raison de l’intégrisme et de toutes les nouvelles théories religieuses qui surgissent à gauche et à droite, mais aussi à cause de cette espèce de vide spirituel qu’on connaît."
Quelle réflexion faites-vous sur l’absence de croyance?
"Ça porte sur le rapport qu’ont les gens avec la spiritualité; ils ont une série de vérités dont ils ne dérogent pas, qui les sécurisent, et après, ils sont un peu comme sur le pilote automatique. C’est ça qui arrive au personnage principal, Conrad, qui a appris l’Évangile par cœur sans savoir quelle est véritablement la signification profonde de ce texte-là."
Qu’est-ce qui a remplacé la foi dans nos sociétés modernes, à votre avis?
"Toutes sortes de choses qui font qu’on se sécurise un peu. Certains vont aller au gymnase quatre fois par semaine, puis il y a ceux qui vont s’acheter un nouveau ski-doo, ou, comme Conrad, un ensemble de salon pour regarder des vidéos la fin de semaine… Finalement, c’est un vide que les gens remplissent en s’agitant beaucoup."
Vous accordez une place importante à la musique country dans la pièce… Pourquoi avoir décidé de passer des messages par cette voie?
"Je trouve que le country, c’est une musique d’une grande mélancolie et qui, en même temps, est basée sur des vérités simples. Il n’y a pas de discours, de nuances; les choses sont dites comme dans un rapport à l’évidence. Ça a été tout un effort d’ailleurs d’écrire des chansons country. On a surtout tendance à faire des choses plus nuancées et complexes, à les enjoliver et à les aseptiser. Tandis que dans le country, c’est le chagrin directement sur la table."
Vous avez aussi créé des personnages qui vivent la petite vie, la petite misère, qui sont nés pour un petit pain…
"Comme dans le titre du livre de Cohen, ce sont des beautiful losers. J’ai toujours été fasciné par ce monde-là. Je me dis qu’on s’est peut-être mieux débrouillés parce qu’on a pris moins de risques qu’eux. Parfois, ils perdent, et c’est dans cette perte qu’il y a une poésie qui me touche beaucoup."
Il y a beaucoup d’artistes acadiens qui donnent dans l’historique en se rapportant toujours à la grande déportation… Que pensez-vous de cette fascination qu’a le peuple acadien pour son histoire?
"François Paré a déjà dit que l’Acadie était écrasée par le poids de son histoire; j’ai tendance à lui donner raison… L’Acadie a une identité très vieille, plus de 400 ans, et on retourne toujours à cette base, on a fétichisé le passé. J’ai plutôt tendance à croire que le présent est plus important. Je pense qu’il ne faut pas ruminer le passé, il ne faut surtout pas commencer à réveiller les morts."
Du 27 septembre au 1er octobre
Au Théâtre Périscope
Voir calendrier Théâtre