Ma mère chien : Intraveineuse
Scène

Ma mère chien : Intraveineuse

Ma mère chien, une introspection psychanalytique qui abandonne le spectateur dans son sillage.

Pour ouvrir la saison, la directrice artistique du Théâtre d’Aujourd’hui, Marie-Thérèse Fortin, a choisi une bien étrange matière. Ma mère chien, une pièce de Louise Bombardier, procède à la disparate chronique d’une mort annoncée, celle d’une mère aigrie et contrôlante. Pour illustrer ce voyage au bout de la nuit, Wajdi Mouawad a transformé la représentation en une vaste cérémonie, un rituel abolissant les frontières entre le réel et l’onirique, un espace imaginaire où les symboles pullulent et où bénédictions et atrocités se confondent.

Au-dessus d’une chambre d’hôpital plutôt réaliste, Guillaume Lord a suspendu un fronton, évocation de la Grèce antique ou d’une chapelle funéraire. Entre ces murs blancs, la fille aînée et écrivaine (Markita Boies) attend la mort de sa mère (Anne Caron, cruellement crédible) alors que cette dernière espère le retour de sa fille cadette et comédienne (Julie Vincent). De cette plateforme, la représentation prend son envol et s’engage dans un véritable délire psychanalytique, une enfilade de cauchemars plus déroutants les uns que les autres. Dans ces songes, baignés par les lumières bleutées d’Éric Champoux, retentissent les inlassables signaux des appareils médicaux, obsédante conception sonore de Christelle Franca.

En réalité, cette chambre est un théâtre, celui de l’inconscient. Le huis clos initial, la pièce ne cesse de le rompre pour y laisser pénétrer fantômes, fantasmes, bêtes mythiques et autres fabrications de l’esprit (des entités auxquelles Patricia Nolin et Robert Lalonde prêtent vie). Sur un plateau suspendu entre la terre et l’au-delà, les réminiscences de la fille aînée – ou serait-ce celles de la mère? – s’amalgament aux plus scabreuses des allégories. Ces retours en arrière permettent d’entrevoir les conflits qui "unissent" les personnages, des relations ravageuses où persécution, jalousie, manipulation, culpabilité et masochisme sont au rendez-vous. En bout de course, et bien que le parcours fasse écho au douloureux bras de fer que se livrent souvent la vie et la mort, l’odyssée échappe à la clairvoyance, frustre celui qui s’y est aventuré de l’apaisement tant espéré.

Jusqu’au 8 octobre
Au Théâtre d’Aujourd’hui
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